Article de C. Kintzler publié sur le site du Monde le 30/01/2015 : L’intégrisme ne peut pas souffrir les points de fuite par lesquels on peut échapper à son exigence d’uniformisation de la vie et des mœurs. Tout ce qui troue ce tissu qu’il veut intégral, ordonné à une parole unique, lui est odieux. Rien d’étonnant à ce qu’il s’en prenne à la liberté d’expression, et généralement à toute altérité.
Les États de droit sont naturellement dans le viseur de son tir ; on se souvient des caricatures au Danemark, de Theo van Gogh, de Rushdie, de Redeker, de Toulouse. Avec les assassinats de Paris, où un parcours sanglant des figures de la liberté a été tracé (le « blasphémateur » qui teste la liberté, le policier républicain qui la protège, le juif qui incarne l’altérité haïe), suivis par la démonstration sans précédent d’un peuple se réappropriant ses principes, on atteint une sorte de classicisme dans l’opposition épurée entre la violence intégriste meurtrière et les principes républicains libérateurs. Dans son éditorial du 14 janvier, Charlie-Hebdo, sous la plume de Gérard Biard, pointe le noyau intelligible de cette opposition absolue : le régime laïque, nec plus ultra de l’État de droit.