Une partie de la gauche croit justifier son refus d’une loi interdisant le voile intégral en s’appuyant sur l’avis rendu par le Conseil d’Etat. C’est oublier que le Conseil d’Etat ne fait pas la loi : il l’a dit. Mais c’est aussi manquer de cohérence et de courage politiques. On ne peut en même temps considérer que la présence du voile intégral dans l’espace de la société civile constitue une atteinte aux principes républicains et battre en retraite dès qu’il s’agit de légiférer, en minorant le phénomène, en se cachant derrière des arguties juridiques et en érigeant l’avis du Conseil d’Etat en vérité révélée et intangible. L’histoire, malheureusement, se répète : la gauche s’était déjà prudemment cachée derrière l’avis que le Conseil d’Etat avait rendu le 27 novembre 1989 dans l’affaire du voile à l’école. Avec le même opportunisme, une partie de la gauche botte aujourd’hui en touche après avoir pourtant exprimé son indignation à propos du voile intégral. Si l’on considère que ce dernier est indigne, alors il faut avoir le courage de ses convictions et oser légiférer : c’est parce que nous n’étions pas d’accord avec la position du Conseil d’Etat que nous avons lutté pendant 15 ans pour obtenir la loi du 15 mars 2004 interdisant le port des signes religieux à l’école.
Telle est la position que l’UFAL a défendue devant la mission parlementaire présidée par André Gérin : parce que le voile intégral efface le citoyen et constitue ainsi une négation de son droit à la singularité, parce qu’il a pour effet de rejeter l’autre à une distance infinie, l’UFAL considère qu’il est à la fois légitime et nécessaire de l’interdire dans tous les espaces de la société civile, c’est-à-dire dans tous ceux accessibles au public. Qui peut préjuger qu’une telle interdiction est anti-constitutionnelle, quand le voile intégral porte atteinte aux principes de liberté, d’égalité et de fraternité qui sont au fondement de notre République ?
Cela étant dit, nous sommes pas dupes des raisons qui inspirent le projet de loi présenté aujourd’hui par le gouvernement. Après la débâcle des élections régionales, la droite sarkoziste a pris acte de la défection des couches populaires (ouvriers et employés) qui sont majoritaires dans notre pays. Ces couches populaires qui font les frais de la politique du gouvernement sont aussi les plus attachées au modèle républicain du vivre-ensemble et les plus favorables à une interdiction du voile intégral.
Aussi est-il affligeant qu’une partie de la gauche continue à creuser le fossé qui la sépare des couches populaires en tombant dans le piège que lui tend le gouvernement. Sans compter qu’en refusant de légiférer sur l’interdiction du voile intégral, cette gauche renforce indirectement la désaffection des couches populaires à l’égard de la politique, désaffection qui est la principale cause de la montée de l’abstention.
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