Le 22 octobre 2020, deux évènements nous ont démontré la triste actualité des propos de Simone de Beauvoir : « N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique économique et religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis ».
Sous la pression des lobbies catholiques réactionnaires, la Pologne, l’un des pays européens les plus restrictifs en matière d’accès à l’IVG, a décrété l’avortement anticonstitutionnel, même en cas de « malformation grave du fœtus » ou « maladie incurable et potentiellement mortelle », signant de facto son interdiction pure et simple. C’est grâce à la puissante mobilisation des Polonaises et des Polonais, descendus par centaines de milliers dans la rue, que le Parlement polonais a reculé et suspendu l’application de cette décision inique. La menace n’en est pas pour autant écartée.
Le même jour, en marge de l’Assemblée mondiale de la santé de 2020 pour défendre le droit des femmes à jouir du meilleur état de santé possible, à l’instigation du Secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo1, une coalition d’Etats signait une déclaration commune « Pour la santé de la femme et le renforcement de la famille », dite « Déclaration du Consensus de Genève ».
Emmenée par les Etats-Unis, le Brésil, l’Egypte, l’Indonésie et l’Ouganda, cette déclaration a été signée par trente-trois pays, tous remarquables par leur déficit démocratique et leur retard caractérisé en matière de droit des femmes, dont le Pakistan, l’Iraq, le Soudan, l’Arabie saoudite la Pologne, la Biélorussie, la Hongrie.
Sous couvert de « promouvoir la contribution essentielle des femmes à la santé et à la force de la famille », les déclarants utilisent des extraits de déclarations et conventions internationales dont ils détournent la forme et le sens, pour se livrer à une remise en cause de l’accès à l’IVG, martelant « qu’Il n’y a pas de droit international à l’avortement, ni d’obligation des Etats de financer ou de faciliter l’avortement », que la priorité est « de permettre aux femmes de mener à bien grossesse et accouchement » et que « les enfants ont besoin de soins particuliers avant et après la naissance. »
Pour cette coalition internationale des extrémismes religieux, peu importe qu’une femme meure toutes les 9 minutes dans le monde d’un avortement non sécurisé ou que la mortalité maternelle des adolescentes atteigne un taux alarmant dans leurs pays respectifs.
Cette charge anti-IVG défend une vision archaïque de la famille, assigne les femmes au rôle stéréotypé de génitrices, et exclut toutes les formes de parentalité autres que le couple hétérosexuel marié.
Même sans valeur juridique, cette Déclaration est un dangereux signal envoyé contre les libertés des femmes et leurs droits sexuels et reproductifs.
Face à cette offensive des obscurantismes religieux qui s’accordent tous à refuser aux femmes leur autonomie, leur dignité et leurs droits, le Collectif Laïque National réaffirme avec force son engagement dans les combats émancipateurs pour l’égalité entre les femmes et les hommes, et son soutien à celles qui luttent contre toute soumission à un patriarcat religieux irréductiblement misogyne. Il rappelle que dans l’Union européenne, les droits sexuels et reproductifs des femmes sont inégalement reconnus selon les Etats et que seule leur inscription dans la Charte des droits fondamentaux serait de nature à les protéger.
- par ailleurs militant évangélique anti-avortement déclaré [↩]