La prise en charge des personnes dépendantes de plus en plus nombreuses, de celles touchées par un handicap à celles liées au vieillissement de la population consécutif à l’allongement de l’espérance de vie, a dominé les débats et le rapport préparatoire à la Conférence de la famille prenant cette année pour thème « La solidarité intergénérationnelle ».
Derrière la volonté affichée de répondre aux besoins sans remettre en cause la solidarité collective, la solidarité intrafamiliale est venue dominer les débats alliée à un système d’aides et de services formant un nouveau marché de l’initiative privée lucrative, comme solution à la question de la prise en charge de la personne dépendante. On a finalement abouti à la justification d’une libéralisation des services autour de la personne dépendante, ainsi qu’un encouragement au bénévolat et à l’aidant familial.
Où est le projet individualisé de la personne en question, et qui sert de garant aux actions mises en place moyennant monnaie autour d’elle et de la qualité professionnelle de celles-ci, comment ses droits sont-ils protégés dans un système du tout libéral, anarchique, où la motivation des associations transformées en entreprises passe de la solidarité nationale à la recherche du profit ? L’inefficacité et l’immoralité de cette démarche doivent être dénoncées.
On doit y opposer, la création d’une nouvelle mission de service public en faveur de la personne dépendante, seule garantie de l’égalité de traitement de chaque personne connaissant ce besoin, seule capable de mettre en place un véritable projet individuel associant partenaires associatifs et famille, soutenant, le cas échéant dans ce cadre, l’aidant familial.
Elle pourrait être confiée aux départements qui gèrent déjà l’action sociale et l’APA et ce, au sein des Circonscriptions d’actions sanitaires et sociales et Maisons de la solidarité départementales, lieu ressource de la polyvalence dans l’accompagnement social de proximité. Un travailleur social nommé par l’administration départementale pourrait être référent du projet individuel de la personne dépendante, garant des actions mises en œuvre autour d’elle.
Evidemment, une telle proposition doit immédiatement être suivie du transfert de moyens nécessaires alors que, précisément il s’agit ici de la part du gouvernement, en encourageant ce système de libéralisation délicatement nommé « économie sociale », de justifier le désengagement de l’Etat de ses missions d¹intérêt général essentielles.
On a oublié au passage dans la question de la solidarité intergénérationnelle, la réponse à apporter à une jeunesse qui ne voit pas d’espoir dans cette société où elle est l’objet d’une précarisation généralisée dont le rejet du CPE n’est que la face visible. Jeunes et exclus cherchant une voie vers le travail se trouvent jetés ici en pâture aux ambitions financières de ces entreprises de «l’économie sociale», sous un régime de précarisation inacceptable, les fameux 300 000 à 400 000 emplois que les services autour de la personne dépendante promettraient.
Donner une réalité à l’égalité de traitement des individus devant la loi toutes générations confondues, procède d’appliquer une règle : chacun participe selon ses moyens et reçoit selon ses besoins selon une protection sociale allant de la naissance jusqu’à la fin de la vie.
Par-delà la question de la santé, la dimension sociale de l’aide aux personnes dépendante est centrale pour leur projet de vie et pour leur lien vivant avec la société, évitant leur isolement.
On ne saurait couper la solidarité intergénérationnelle du projet d’une société plus juste répondant de façon cohérente aux besoins de tous ses membres, selon un sens qui est celui de la complémentarité, de la réciprocité, de la solidarité.
Le lien entre combat laïque et combat social a, on le voit ici, de l’avenir. Il est au cœur des batailles en faveur de véritables politiques publiques fondées sur l’intérêt général et la solidarité nationale.
Lucette Guibert