Derrière le « bouclier sanitaire » se cachent les soldat de Chadelat.
« Rendre le système de prise en charge de nos dépenses de santé plus juste, simple et rationnel », telles sont les missions de Bertrand Fragonnard (président du Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie) et de Raoul Briet (président de la commission de périmètre des biens et services remboursables de la Haute Autorité de Santé. » Parmi les propositions suggérées, il y a la création d’un « bouclier sanitaire » pour établir un plafond aux restes à charge après remboursements, dans le même temps que les franchises médicales sont mises en place. De la même manière, la TVA sociale est proposée comme remède au déficit du commerce extérieur, alors qu’elle réduira les cotisations sociales (donc notre salaire) qui finance la sécurité sociale1.
Nous ne sommes plus dans le cadre d’une sécurité sociale solidaire où chacun cotise en fonction de ses moyens et bénéficie en fonction de ses besoins. Il s’agit là de recevoir des remboursements en fonction des moyens financiers du ménage (ou du foyer) d’un panier de soins en deçà des besoins. C’est la fin de la sécu solidaire qui se voulait universelle et la mise en place du panier de soins minimum. C’est la charité institutionnelle.
Le bouclier pourrait s’exprimer en fonction du revenu des ménages et par foyer!
Derrière ce jargon, il y a l’obligation familiale. Dans un environnement où « l’Etat social » recule si fortement, la famille reproduit les inégalités sociales. Face à ce « bouclier sanitaire », les inégalités sociales ne sont pas prêtes de s’estomper. C’est la prépondérance de la solidarité intergénérationnelle familiale, rendue obligatoire, et la fin de l’égalité des citoyens.
Ce bouclier prétend corriger les injustices dont seraient victimes certains assurés qui payent intégralement les tickets modérateurs face à ceux qui profiteraient de leur exonérations de tickets modérateurs au point d’avoir 4 fois moins à leur charge. Singulière conception de la justice qui remplace l’égalité par l’équité et selon laquelle les pauvres et les malades sont des privilégiés !
Selon l’article 1er du code de la sécurité sociale, celle –ci « garantit les travailleurs et leurs familles contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gains ». Dans leur lettre de mission, messieurs Fragonnard et Briet doivent «Estimer les modalités techniques et les délais pour établir un lien entre les fichiers de l’assurance maladie et les revenus des assurés ».
Faire référence aux revenus et non plus au salaire sur lequel les cotisations sont assises, c’est déconnecter la solidarité des travailleurs de la richesse produite par le travail. C’est la poursuite de la fiscalisation de la sécu ».
«Examiner le niveau du bouclier suivant les hypothèses du co-paiement » ; indiquer les conséquences financières et organisationnelles pour les organismes d’assurance complémentaires ». Mais dans cette hypothèse, n’est-ce pas « l’équation Chadelat » qui définira ce « bouclier » sanitaire :
CMG (Couverture Maladie Généralisée) =AMO (Assurance Maladie Obligatoire) + AMCB (Assurance Maladie Complémentaire de Base) ?
N’est ce pas cette équation qui a servi d’argument pour la nouvelle gouvernance de la sécu, avec l’introduction des assurances complémentaires privées dans la foulée de la mutualité officielle en 2004 ? Dans cette équation, s’il y a diminution progressive des remboursements sécu (AMO) et augmentation de la part des complémentaires santé (AMCB) ainsi que du reste à charge des assurés, n’est ce pas une privatisation des remboursements des soins ?
Et le panier de soins , n’est ce pas ce qui sera pris en charge par la CMG ?
Alors, si le bouclier sanitaire prétend fixer des limites aux franchises, ce n’est qu’une protection illusoire pour rendre acceptable les tickets modérateurs non remboursables pour certains assurés. De la même manière, la TVA dite sociale est aussi une nouvelle étape de privatisation de la sécurité sociale par l’une des impôts le plus inégalitaire.
C’est dire l’importance de nos actions du 29 septembre contre ces « franchises »!
Pour aboutir, elles sont à replacer dans le cadre tout aussi général de la proposition alternative des Etats Généraux de la Santé et de l’Assurance Maladie (EGSAM) : prise en charge à 100% par la Sécurité sociale des soins utiles et nécessaires dans le cadre d’une réelle démocratie sanitaire.
Notre équation EGSAM, dans le jargon Chadelat c’est CMG = AMO ; notre gouvernance c’est les représentants élus des assurés sociaux.
Les présidents Fragonnard et Briet, vont travailler toutes les vacances pour rendre leur rapport fin août. Prenons des forces pendant ces vacances, nous aurons à nous battre à la rentrée contre des « boucliers » derrière lesquels se cachent les soldats de Chadelat, un des commandos de la privatisation de notre système de sécurité sociale.
A bon entendeur!
Notes
- Voir le rapport Chadelat (8 avril 2003!)
- Présentation de la mission de Bertrand Fragonard et Raoul Briet sur le site « annuaire sécu »
Bertrand Fragonard et Raoul Briet chargés d’un rapport sur le « bouclier sanitaire »
12/07/07 – Les ministres de la Santé, du Budget et des Comptes publics, et le Haut commissaire aux Solidarités actives contre la pauvreté ont confié le 10 juillet une mission à Raoul Briet, président de la commission de périmètre des biens et services remboursables de la Haute Autorité de santé, et à Bertrand Fragonard, président du Haut Conseil sur l’avenir de l’assurance maladie, sur les conditions de mise en œuvre d’un bouclier sanitaire. Une première synthèse de leurs travaux est attendue pour la fin du mois d’août.
Réticent au principe d’une franchise, Martin Hirsch avait suggéré d’instaurer un « bouclier sanitaire » qui consisterait à instituer un plafond des restes à charge supportés par les assurés sur la dépense remboursable (franchise, ticket modérateur et participations forfaitaires compris). Un tel bouclier peut être défini de manière uniforme ou s’exprimer en fonction du revenu des ménages, comme l’ont décidé d’autres pays. Dans son discours de politique générale, le 3 juillet, François Fillon avait souhaité « que s’ouvre sur ce sujet un débat sans a priori ».
Dans leur lettre de mission, les ministres demandent aux deux présidents d’engager une analyse des enjeux et des modalités techniques de cette proposition en se basant sur les expériences étrangères.
- Voir plus loin les raisons avancées pour ce bouclier ainsi que l’ordre de mission accessible à cette adresse:www.annuaire-secu.com/html/news257.html. [↩]