Mise en place par le Ministre de l’Intérieur, la « commission de réflexion juridique », présidée par le professeur de droit Machelon1, n’avait ni la représentativité d’une commission parlementaire, ni la légitimité d’une commission pluraliste d’enquête. Dans sa lettre de cadrage du 20 octobre 2005, Nicolas Sarkozy lui demandait de « prendre en compte les attentes des grandes religions de France », se disant « convaincu de la nécessité d’apporter aujourd’hui un certain nombre d’amendements au corpus des textes (loi de 1905, code général des collectivités territoriales, code de l’urbanisme, code des impôts) régissant l’exercice des cultes et leurs relations avec les pouvoirs publics ».
Cette commission ministérielle, formée de 16 conseillers d’État, magistrats, universitaires et théologiens connus pour leurs options religieuses ou leurs opinions favorables au droit local alsacien, a auditionné 45 personnalités, dont 21 religieux de diverses obédiences mais seulement deux militants laïques membres de la Ligue de l’enseignement. On peut douter de l’objectivité du rapport de cette commission dès l’analyse de ses « considérations générales ». Si elle reconnaît « l’attachement des Français à la séparation des Églises et de l’État » et la nécessité de « réaffirmer la laïcité », elle se fixe pour objectif de « rechercher une meilleure adaptation du droit des cultes à l’évolution de la société française (…) pour donner tout son sens à la liberté de religion » (p. 9).
Des « considérations générales » fort discutables
La commission entend d’abord fonder sa réflexion au plan sociologique en partant d’un tableau des « appartenances religieuses » des Français. À partir du sondage IFOP-La Croix de 2006, elle constate que « le paysage confessionnel a changé depuis cent ans » : même si « 65 % d’entre eux se déclarent catholiques », « la France est le pays européen qui compte le plus grand nombre de musulmans, de juifs et de boudhistes ». Même si les pratiques régulières sont en déclin, même si « l’agnosticisme progresse », les religions continueraient à jouer un rôle majeur dans les affirmations identitaires, en particulier chez les évangélistes, les musulmans et dans les « groupes charismatiques ». La commission confond ainsi l’« exercice des cultes » et le « sentiment d’appartenance à une religion ». Elle privilégie les comportements culturels ou coutumiers d’origine religieuse.
La commission ignore les conclusions d’autres études sur les types de convictions spirituelles des Français. D’après l’enquête du CSA-Le Monde de 2003, 58 % des personnes interrogées se disent « croyantes » (24 % affirmant que l’existence de Dieu est certaine et 34 % probable), 41 % se disent « incroyantes » (19 % estimant que l’existence d’un dieu est improbable et 22 % la niant absolument. Les athées sont donc presque aussi nombreux en France que les croyants convaincus et les agnostiques représentent entre 19 et 54 % des Français. Les Données sociales de l’INSEE de 2003 apportent des précisions incontestables sur les pratiques cultuelles : 12 % seulement des Français de toutes religions ont une pratique cultuelle régulière et 15 % une pratique occasionnelle. Avant de statuer sur l’exercice des cultes, il conviendrait de remarquer que 58 % n’ont aucune pratique religieuse et que les agnostiques et les athées sont des citoyens tout autant que les croyants pratiquants.
La commission se livre ensuite à un rapide historique pour affirmer que « l’actualisation [de la loi de 1905]ne paraît pas illégitime et ne menace aucunement notre héritage républicain » (p. 10). Puisque la loi de 1905 admet que « la République ne peut ignorer le fait religieux en tant que fait social » et que « la contributions des Églises à la vie en société n’est plus perçue désormais comme la manifestation indésirable d’un désir (sic) d’hégémonie politique », le rapport conclut bien vite que « l’histoire même de la laïcité en France contredit l’idée d’une étanchéité entre les deux sphères » (p. 7). Admettant comme nécessaires à la paix civile toutes les concessions faites depuis 1914 par l’État aux Églises, la commission souligne que les Présidents de la République reçoivent les représentants des divers cultes et que Lionel Jospin a décidé le 13 février 2002 que le gouvernement recevrait régulièrement les délégués de la Conférence des évêques de France. Elle se félicite que Mr Raffarin ait même reconnu devant eux le 14 février 2005 « l’intervention positive des religions dans le dialogue public ». La commission considère donc les religions comme des « réalités sociales » devant entretenir un « dialogue ouvert, transparent et régulier » avec l’État comme le prévoyait le projet de constitution européenne.
Enfin, la commission légitime ses propositions au nom du principe d’une « laïcité apaisée » (p. 7) car elle entend « poser en termes renouvelés la question de l’égalité de traitement entre les cultes. » Les rédacteurs affirment donc ouvertement que la laïcité est « l’égalité entre les religions » selon la conception anglo-américaine et non l’égalité entre toutes les croyances spirituelles et options philosophiques selon la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Ils se réfèrent à un arrêt du Conseil d’État de 2004 pour définir la laïcité par les seuls principes de neutralité de l’État et de respect de la liberté religieuse. Mais ils ignorent que le principe premier de la laïcité est « La République assure la liberté de conscience », la liberté de croire ou de ne pas croire (article 1er de la loi de 1905).
La commission ne songe même pas à dissimuler l’instrumentalisation politique de la question religieuse qui est recherchée. Elle affirme en effet qu’il y a contradiction entre le principe selon lequel « La République respecte toutes les croyances » (art 2 de la constitution de 1958) et le fait que « les fidèles des deux confessions en expansion récente, l’islam et le christianisme évangélique, rencontrent de réelles difficultés pour pratiquer leurs cultes » (p. 12). La République devrait donc « répondre à leur attente en matière cultuelle » pour « favoriser l’intégration de ces populations ». C’est avouer que le but des réformes proposées n’est pas tant la garantie de la liberté de culte que le ciblage politique de deux communautés religieuses dynamiques. Et cela dans un double intérêt, par « sollicitude à l’égard de groupes sociaux souvent en relégation sociale » et « dans le contexte international actuel » (p. 28).
Comment « faciliter la construction de nouveaux édifices du culte » ?
La commission Machelon propose non seulement d’améliorer les aides indirectes que les communes accordent aujourd’hui aux cultes mais encore d’« autoriser formellement l’aide directe à la construction de lieux de culte » (p. 25).
1°) Les baux emphytéotiques auxquels ont souvent recours les communes pour louer des terrains, afin que des associations cultuelles puissent y construire des lieux de culte, devraient être assortis d’une « option d’achat » du foncier afin de garantir à ces associations la propriété des édifices cultuels à l’expiration du bail.
2°) Toutes les collectivités territoriales auraient la possibilité d’octroyer soit des « garanties d’emprunts », soit des « avances remboursables » à « toutes les associations à vocation cultuelle » prenant en charge la construction d’édifices du culte sur « tout le territoire national », et non seulement dans les zones nouvelles de développement urbain comme admis par la loi du 29 juillet 1961.
Mais « une large majorité » de la commission a estimé que ces améliorations des pratiques actuelles n’étaient pas suffisantes. Elle propose donc
3°) « l’octroi d’aides à la construction d’édifices du culte », sans plafonnement ni discrimination. Alors que la législation actuelle privilégie « l’aide à l’existant » et au fonctionnement, il s’agirait de passer à l’aide directe à l’« investissement ». Toutes les religions seraient concernées, l’Église catholique ayant des problèmes de « redéploiement », l’islam connaissant une « remarquable phase de rattrapage » et « la situation des mouvements évangéliques étant la plus préoccupante » p. 16). Bien que cette aide directe des communes à la construction de lieux de culte ne soit présentée que comme une « faculté », on peut imaginer que toutes les propositions en ce sens ne manqueraient pas de soulever des débats très vifs dans les conseils municipaux au sujet de « l’intérêt général de ces initiatives ». Au lieu de maintenir la paix religieuse entre les citoyens, cette innovation créerait des conflits permanents entre communautés.
L’opinion publique n’a pas été alertée sur trois autres propositions particulièrement graves de la commission.
1°) Elle appelle à sanctionner les maires refusant l’établissement de lieux de culte par des considérations d’urbanisme et demande que des terrains municipaux soient destinés à des lieux de culte en tant qu’« équipements d’intérêt collectif à caractère public ou social » (p. 31) comme en Espagne et en Allemagne.
2°) Elle propose que les collectivités locales procèdent à l’entretien et aux réparations de tous les bâtiments « propriétés de tout type d’association à vocation cultuelle » (p. 32). C’est étendre encore le champ de la loi du 25 décembre 1942, jamais abrogée, par lequel le régime de Vichy faisait obligation aux communes de procéder aux réparations de toutes les églises, même de celles qui n’étaient pas biens communaux.
3°) Enfin « la commission préconise la suppression de l’article 22 de la loi de 1905 … » (p. 42). Or le dernier alinéa de cet article méconnu stipule que les associations cultuelles peuvent « constituer une réserve spéciale dont les fonds devront être déposés, en argent ou en titres nominatifs, à la Caisse des dépôts et consignations pour être exclusivement affectés à l’achat, à la construction, à la décoration ou à la réparation d’immeubles ou meubles destinées aux besoins de l’association. » En supprimant l’article précisant les conditions dans lesquelles le financement de l’achat et de la construction de lieux de culte est aujourd’hui possible grâce à la contribution volontaire des seuls fidèles et d’autres associations, la commission abolit tous les moyens de contrôle financier sur les fonds recueillis par les associations et invite celles-ci à demander systématiquement des aides publiques.
Comment légitimer ces propositions de financement public des lieux de culte ?
Pour cela la commission entend récuser « la portée constitutionnelle de l’article 2 de la loi de 1905 » : « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte ».
La commission affirme que « la “non-reconnaissance“ ne paraît pas revêtir le caractère d’une règle constitutionnelle » car l’article 2 ne définirait que le « principe général de neutralité et d’indétermination religieuse de l’État ». Certes elle admet que la loi de 1905 a abrogé l’ancien statut de droit public des cultes pour y substituer « un statut commun de droit privé », mais elle estime que l’État continue à reconnaître les cultes puisqu’il exerce toujours un « contrôle public sur l’acquisition du statut d’association cultuelle » (p. 22). La commission ignore que la loi de 1905 a mis fin à la reconnaissance publique de l’utilité sociale des religions, mais qu’elle s’est refusée à ignorer l’existence des cultes dans la société, ne serait-ce que pour des raisons d’ordre public. L’ignorance historique des rédacteurs est flagrante quand ils écrivent que « la loi de 1905 maintient en vigueur le régime particulier des congrégations lequel comporte une procédure de reconnaissance. » Non seulement les législateurs de 1905 avaient écarté volontairement les congrégations du champ de la loi de 1905, mais la plupart de celles-ci avaient été interdites pour avoir refusé de se conformer à la loi sur les associations de 1901. Les rédacteurs du rapport Machelon interprètent donc abusivement les articles 4 et 6 de la loi de 1905 comme une déclaration de reconnaissance des cultes et estiment donc implicitement qu’ils sont en contradiction avec l’article 2 qu’ils remettent en cause ouvertement.
La commission nie également le caractère constitutionnel de l’article 2 de la loi de 1905 en affirmant que « l’interdiction de subventionner les cultes n’est pas un principe fondamental reconnu par les lois de la République » (p. 19). La loi de 1905 ne fixerait que « les modalités concrètes » du principe de neutralité religieuse de l’État. Là encore les rédacteurs font preuve ou de leur ignorance ou de leur mauvaise foi. En effet, l’article 2 qui déclare que « La République ne subventionne aucun culte » fait partie du titre I de la loi qui a été intitulé volontairement « Principes ». Briand s’en expliqua en précisant que « les législateurs s’engageaient ainsi envers le pays en proclamant des principes rationnels d’action quelles que soient les circonstances ultérieures de la séparation »2 et que ces principes devaient à l’avenir inspirer les législateurs et les magistrats. Mais les rédacteurs osent contredire cette déclaration en écrivant qu’« incertaine dans sa définition, l’interdiction de subvention des activités religieuses s’avère aussi peu cohérente eu raison de la multiplicité des dérogations que connut cette règle (p. 20). Et la première dérogation qu’ils invoquent est la loi du 25 décembre 1942 de l’État français, qui certes n’a pas été abrogée en 1944 par le général de Gaulle, mais qui ne peut passer pour une loi de la République ! Autres dérogations invoquées par les rédacteurs : les aumôneries et l’affectation aux cultes de bâtiments publics prévues par … la loi de 1905 elle-même qui serait ainsi contradictoire. Ils ignorent que les législateurs admirent alors ces modalités pour que l’État puisse garantir à tous les citoyens l’exercice de leur culte, et non pour financer les cultes. Ils confondent donc la garantie par la République de la liberté religieuse et la conservation du patrimoine public avec le financement direct de biens privés et d’activités particulières.
Sans l’avouer ouvertement, la commission propose donc l’abrogation de l’article 2 de loi de 1905 en le vidant de son contenu théorique et pratique. Pour cela, elle part d’une lecture déformée de l’article 1 de loi et définit la laïcité par la simple « neutralité confessionnelle de l’État » et « l’égalité de traitement entre les cultes. »
Comment « élargir l’objet social des associations cultuelles » ?
La commission Machelon remet en cause également les articles 18 et 19 de la loi de 1905 qui déclarent que les associations cultuelles « doivent avoir exclusivement pour objet l’exercice d’un culte ». En critiquant cette définition restrictive et en préconisant « l’élargissement de l’objet des cultuelles » (p. 47), le rapport remet implicitement en cause toute la jurisprudence du Conseil d’État qui affirmait encore dans son avis du 24 octobre 1997 qu’un culte se définit par « la célébration de cérémonies organisées en vue de l’accomplissement par des personnes réunies par de mêmes croyances religieuses de certains rites ou pratiques ». Alors que le Conseil d’État a jusqu’à nos jours maintenu une claire distinction entre les « activités cultuelles » et les activités culturelles », la commission se propose d’« élargir l’objet social » des associations cultuelles (p. 46) afin d’« accroître l’attractivité du statut » de ces associations p. 51).
L’exercice des cultes ne relève pas en France d’un cadre juridique unique puisque, devant l’obstruction de l’Église catholique et son refus de créer des associations cultuelles, la loi du 2 janvier 1907 autorise l’exercice des cultes soit par des associations cultuelles type 1905, soit par des associations de droit commun type 1901, soit même par de simples réunions privées relevant de la loi de 1881. Les associations cultuelles type 1905 ont un régime fiscal plus favorable que les simples associations type 1901 : elles ne paient pas de taxe foncière et les dons et legs qu’elles reçoivent peuvent être déductibles des revenus déclarés. Par contre, les associations type 1905 peuvent bénéficier de subventions publiques si elles sont reconnues d’utilité publique. Les groupements religieux ne peuvent recevoir de subventions que pour leurs activités non cultuelles, sociales, éducatives, sportives à condition de les faire dépendre d’associations type 1901 reconnues d’utilité publique.
La commission part d’un triple constat pour demander l’« assouplissement des associations cultuelles » (p. 43) :
1°) Les associations « à double visage », essentiellement protestantes et évangéliques, seraient « doublement pénalisées » ne pouvant pas recevoir de subventions ni bénéficier d’avantages fiscaux.
2°) Les associations musulmanes seraient à 90 % de type 1901 car elles répugneraient à fonder des associations cultuelles soumises au contrôle public de leur activités. « Le cloisonnement entre les activités “cultuelles“ et les activités “culturelles“ (tout ce qui n’est pas exclusivement cultuel) est particulièrement difficile à intégrer pour la religion musulmane qui méconnaît une telle distinction » (p. 45).
3°) Il serait impossible pour une association cultuelle de « financer directement une chaîne de télévision ou un mouvement humanitaire ou de bienfaisance », de fonder des « sociétés de production » et de « gérer des immeubles de rapport » (p. 45). On voit bien quels types d’activités économiques ou médiatiques les rédacteurs entendent faciliter.
La commission préconise donc de négocier avec les « représentants des religions » l’assouplissement du régime juridique des cultuelles et l’élargissement de leur objet pour « définir un périmètre satisfaisant » d’« activités complémentaires à l’exercice du culte » (p. 47). Elle préconise surtout de « mettre fin à l’étanchéité financière entre les associations cultuelles et les associations type 1901 » (p. 48), donc de permettre le cumul des avantages des lois de 1901 et de 1905. Elle recommande que « les associations à objet cultuel (type 1901) qui le souhaitent puissent se transformer, sans incidence fiscale, en associations cultuelles de la loi de 1905 », c’est-à-dire exonérer de taxe foncière les mosquées et temples. Elle préconise de permettre aux associations cultuelles de « financer des associations de bienfaisance ou d’utilité publique », donc de bénéficier à ce titre de subventions publiques en généralisant l’exemple du Secours catholique. Elle propose encore de « renforcer les avantages fiscaux des donateurs aux associations cultuelles » en portant à 75 % la déduction d’impôt octroyée et en traitant de la même manière tous les dons faits à « toutes les associations cultuelles ».
Commentaires
À nos yeux, ces propositions visent à permettre le financement direct par les communes de toutes les activités autres que cultuelles des futures « associations à objet religieux ». Bien que très mal définies, elles pourraient se voir attribuer rapidement la pleine reconnaissance juridique et un statut d’utilité publique. Elles pourraient disposer de subventions publiques nationales ou locales et disposer librement de leurs fonds.
La finalité de ces propositions est d’ailleurs ouvertement reconnue par le rapporteur. « À plus long terme, la majorité de la commission estime que devrait être envisagée la création d’une forme particulière de reconnaissance d’utilité publique pour les activités religieuses 3(…) ouverte à toute association à objet religieux. » Il suffirait de « reconnaître que les activités religieuses ont une utilité publique telles que la contribution à l’éducation ou à la culture, à l’intégration ou au développement d’activités caritatives » (p. 50).
Ainsi, le rapport Machelon reprend quasiment terme à terme les propositions émises en 1905 par les catholiques et protestants conservateurs partisans d’une « séparation à l’américaine » qui réclamaient la reconnaissance de toutes les « libertés des Églises ». En préconisant de vider de leur sens les articles 1 et 2 et une nouvelle rédaction des articles 18 et 19 de la loi de 1905, le rapport Machelon reprend les réclamations de l’Église réformée de France qui demandait en 1945 et 1958 l’extension de la notion d’exercice du culte et la reconnaissance du caractère cultuel de toutes activités rattachées aux institutions religieuses. En 2002, dans son rapport Cultes, équité, laïcité, remis à Lionel Jospin, l’ERF affirmait que les Églises « doivent trouver leur juste place dans la société civile entre l’État et les citoyens » car « elles ont vocation et expérience à participer à toutes les dimensions de la vie sociale. »
En demandant la suppression de l’article 22 de la loi de 1905, Nicolas Sarkozy annihile la création de la Fondation des œuvres musulmanes de France créée par Dominique de Villepin qui permettait de faire financer la construction de mosquées par des fonds privés et des dons volontaires. Il entend attirer à lui les musulmans et les évangélistes par l’attrait d’aides publiques à la construction et d’avantages fiscaux. En remettant en cause la notion d’« exercice exclusif d’un culte », il ouvre la voie à la reconnaissance de toutes les sectes, Église de Scientologie en tête, comme des « associations à objet religieux ». Il est surprenant qu’au moment où le gouvernement réduit systématiquement les crédits des services publics, il envisage de subventionner largement les cultes croyant acheter par là l’ordre public et le calme social. Il faut lui répondre que « La religion n’est pas un service public »4
« Aucune difficulté concernant le droit européen n’est à signaler » reconnaît le rapport Michalon (p. 18). Effectivement, ses propositions sont dans le droit fil des mesures préconisées par le projet de constitution européenne, pourtant rejeté par la majorité du peuple français le 29 mai 2005, qui reconnaissait un statut d’utilité publique à toutes les Églises et « communautés religieuses » en tant qu’ « associations représentatives de la société civile » et qui préconisait un « dialogue ouvert, transparent et régulier » entre elles et les autorités communautaires sur « tous les domaines d’action de l’Union » (article I-47).
Nicolas Sarkozy, en reprenant les propositions du rapport Machelon, s’engagera dans une véritable opération de remise en cause de la loi de 1905 et de la séparation des cultes et de l’État. Oui, la laïcité et la démocratie sont en danger !