L’UFAL a été informée par des parents d’élèves qu’à la rentrée prochaine un certain nombre d’EVS et d’AVS (emplois de vie scolaire) ne seraient pas reconduits. La nouvelle est d’autant plus inquiétante que ces employés étaient préposés à l’accompagnement d’enfants dont le handicap nécessite des soins particuliers. La situation de ces enfants handicapés sera donc encore plus difficile et précaire.
Pour comprendre ce qui va se jouer à la rentrée 2008, il faut faire un petit retour en arrière. Nous assistons en effet à la fin d’une sinistre pièce qui s’est jouée en trois actes. Cette pièce est édifiante : on y voit avec quel brio le pouvoir politique condamne les enfants handicapés à la précarité et rend les professeurs un peu plus corvéables. On y apprend comment appliquer une logique comptable féroce tout en affichant les meilleurs sentiments du monde.
Premier acte : l’Assemblée Nationale vote en février 2005 la loi Montchamp qui prévoit la scolarisation des enfants handicapés dans l’école de leur quartier. Au nom de la lutte contre les discriminations, on décide que tous les enfants seront scolarisés dans des écoles ordinaires, y compris ceux qui ne sont pas comme les autres. Aux enseignants un peu sceptiques qui se demandent comment ils pourront accueillir dans leur classe un enfant polyhandicapé ou autiste, aux associations qui, comme l’Ufal, déplorent que la loi ignore la spécificité des handicaps, aux pédiopsychiatres, pédiatres, médecins scolaires et parents qui, dans une pétition, expliquent quel’école est un lieu d’instruction et d’éducation et qu’ elle ne peut se transformer en lieu de soins, on répond par le terrorisme intellectuel : on accuse les récalcitrants d’être méchants, de désespérer les parents, ou pire, de stigmatiser les enfants handicapés. Il n’y a rien de plus efficace qu’une parole d’excommunication pour balayer les arguments des professionnels. Mais la réalité qui se prépare en coulisses est à mille lieues de l’angélisme affiché : suppression des classes à effectifs réduits dans les écoles spécialisées, économies de postes d’enseignants spécialisés itinérants, disparition programmée des médecins scolaires, le gouvernement a la ferme intention de faire des économies drastiques sur le dos des enfants handicapés.
Deuxième acte : le gouvernement décide que les EVS et les AVS seront chargés de l’insertion des enfants handicapés dans le milieu scolaire. Sont affectés dans les écoles maternelles (EVS) et primaires (AVS) des personnels dont la mission est de faciliter l’accueil des enfants handicapés. Là encore, l’enfer est pavé de bonnes intentions : on crée pour ces personnels des contrats spécifiques au nom enchanteur (les Contrats d’Avenir), on favorise l’embauche des bénéficiaires des minima sociaux, on leur permet ainsi de revenir dans le monde du travail et de se former. En coulisses, on fabrique de nouveaux travailleurs pauvres : c’est à une main d’oeuvre non qualifiée et qui a parfois connu des années de précarité, qu’on confie la difficile mission de s’occuper des enfants les plus fragiles, pour un salaire correspondant à 26 heures payées au SMIC (soit 700 euros environ) et sur la base d’un contrat à durée déterminée.
Troisième acte : en supprimant des postes d’AVS et d’EVS à la rentrée, le gouvernement s’apprête à siffler la fin de la partie. Ce sera aux professeurs des écoles d’assumer la lourde responsabilité de veiller à l’instruction, aux soins et à la bonne insertion d’enfants handicapés dans des classes dont les effectifs sont déjà lourds et sans aucune assistance. Gageons que dans sa grande générosité, le gouvernement acceptera de rétablir ici et là quelques emplois de vie scolaire pour faire taire les parents les plus insistants. Il aura ainsi réussi une double opération -jeter comme des kleenex des employés précaires à qui on avait promis un avenir professionnel et économiser des emplois qualifiés- tout en se faisant passer pour le champion de la cause des enfants handicapés.