Après deux ans de pouvoir, le gouvernement Hollande-Ayrault affiche des résultats catastrophiques dans le domaine du logement et l’année 2014 sera pire. Ainsi, pour ce qui concerne les ventes des promoteurs immobiliers, c’est le désastre : les chiffres de ventes sont au même niveau qu’en 1992.
Au vu des indicateurs actuels, on peut anticiper un recul de 10 à 12 % des ventes aux particuliers cette année, soit 67 000 logements, ce qui se rapprocherait dangereusement du creux de 1992, où seulement 62 300 ventes avaient été enregistrées, souligne François Payelle, le Président de la Fédération des Promoteurs Immobiliers (FPI), sachant qu’à l’époque, la France comptait 56 millions d’habitants, contre 66 millions aujourd’hui et que les besoins ne sont donc pas les mêmes. »
Un cas d’école : la région Parisienne
Cette région connaît depuis plusieurs années une grave crise du logement. La loi du Grand Paris prévoit la construction de 70 000 logements par an pour résorber le déficit de logements. En 2013, il y a eu moins de 35 000 logements construits sur l’ensemble de la région, alors que les demandes de logements sociaux explosent (529 000 demandeurs dans le fichier SNE). Au rythme actuel des constructions, il faudra une quinzaine d’années pour résorber le déficit, à population constante. Ce qui évidemment est inenvisageable.
Près de 3 millions de personnes sont logées dans le parc locatif des organismes de logement social en Île-de-France – OLS – OPS 2009
33 % des ménages logés dans le parc locatif social bénéficient d’une aide au logement – CAF d’Île-de-France 2011
63 % des ménages occupant un logement social ont des revenus inférieurs à 60 % des plafonds de ressources PLUS et 17 % des ménages ont des revenus inférieurs à 20 % des plafonds de ressources PLUS – OLS – OPS 2009.
50 % des logements sociaux sont concentrés dans des 10 % des communes d’Île-de-France.
42 % de l’ensemble des ménages franciliens ne sont pas propriétaires et peuvent prétendre à un logement social (PLAI, PLUS, PLI) compte tenu de leurs revenus.
65 % des recours DALO (droit au logement opposable) se situent en Ile-de-France.
C’est donc une population avec des revenus largement inférieurs à la moyenne qui occupe les logements sociaux. Et contrairement à ce qui se passe dans les autres régions, cette population reste dans son logement (le taux de renouvellement est de 6,7 % contre 9,9 % au niveau national).
La politique du gouvernement : ne pas se presser
La loi du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social, qui devait permettre de mobiliser le foncier public et obliger les communes qui ont moins de 25 % de logement social à appliquer la loi, vient tout juste d’entrer en application.
15 mois après la promulgation de la loi, l’ancienne ministre du Logement vient juste d’envoyer une circulaire aux préfets. Ceux-ci doivent « faire preuve de fermeté à l’égard des communes dont le bilan 2011-2013 serait particulièrement négatif, en usant notamment de [leur]pouvoir de sanction qui a été renforcé par la loi et confirmé par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2012-660 DC du 17 janvier 2013 ».
De plus, l’instruction rappelle que la loi prévoit une accélération du rattrapage dans les communes concernées. Ainsi, les objectifs de la 5e période triennale (2014-2016) sont fixés à 25 % du nombre de logements locatifs sociaux manquants, ceux de la 6e à 33 %, de la 7e à 50 % et ceux de la 8e (2023-2025) à 100 % des logements manquants. Pour que le développement de l’offre locative sociale soit cohérent avec les besoins du marché de l’habitat, l’instruction demande aux préfets – comme le prévoit la loi – de notifier aux communes concernées la typologie des logements à produire sur la période triennale (PLUS, PLAI et PLS).
Si le préfet constate qu’une commune n’a pas atteint son objectif de rattrapage « alors que le contexte communal ne le justifie pas », il lui appartient de prononcer la situation de carence de cette commune par arrêté motivé. Dans son instruction, Cécile Duflot demande aux préfets « de faire preuve d’une grande fermeté à l’encontre de ces communes qui refusent de prendre part à l’effort de solidarité nationale ».
Enfin une circulaire instructive permet aux préfets d’obliger les communes à construire sous peine d’amendes dissuasives, puisqu’elles peuvent être multipliées par 5. Mais pourquoi avoir attendu 15 mois pour demander aux préfets d’appliquer la loi ?
Les mesures prises sur le dos des locataires
L’APL et l’ALS n’ont pas encore été revalorisées cette année, et la prochaine revalorisation est prévue en octobre 2014. Donc les locataires devront attendre presque 2 ans pour avoir une revalorisation des aides.
Depuis 2009, l’épargne des livrets A et bleu est répartie entre les banques, les caisses d’épargne et la Poste, ce qui a permis aux banques de récupérer 100 milliards de cette épargne qui doit assurer le financement du logement social. Le PS s’était élevé contre cette spoliation, mais, arrivé au pouvoir, il n’a rien modifié.
Il en est de même avec la fin de la rétroactivité des APL. Ce système permettait au locataire de percevoir les APL au jour d’entrée dans le logement. Avec la réforme, il ne touche son APL qu’à la date d’acceptation du dossier, ce qui représente près de 300 millions d’euros « d’économie ». Le PS, qui s’était élevé contre cette mesure sous Sarkozy, n’a encore une fois rien modifié en arrivant au pouvoir. Pourtant, le candidat Hollande avait indiqué dans son programme : « C’est pourquoi je me suis engagé à réaliser 150 000 logements réellement sociaux par an, grâce au doublement du taux du Livret A et des aides à la pierre, car je crois comme vous que c’est à la solidarité nationale de financer le logement pour tous ». Promesse non tenue. Le doublement devait être effectif en janvier 2013, nous attendons toujours. Il n’a été relevé que de 50 % en septembre 2012.
La TVA sur les travaux est de 10 % sauf pour certains travaux énergétiques. La TVA a donc doublé de Sarkozy à Hollande sur la grande majorité des travaux réalisés en HLM.
Cécile Duflot est partie, le problème du logement est toujours là, et la nouvelle ministre, Sylvia Pinel, dont les prérogatives ministérielles ont été réduites, ne changera pas grand-chose au désastre en cours. Le problème du logement est complexe. Les aides fiscales et sociales représentent plus de 40 milliards par an, sans que la construction progresse. Il faut du courage pour s’attaquer au mal du logement, mais surtout faire des choix politiques et de société.
En France, nous avons les prix au m² les plus élevés d’Europe, à la location et à la vente. C’est une difficulté réelle. Et le prix du foncier et le poids des normes sont des facteurs de renchérissement. Le coût du logement constitue une ponction sans précédent sur le pouvoir d’achat. En 50 ans, la part du budget familial consacré au logement a doublé passant de 10 % à 20 % du revenu, sachant que c’est une moyenne et que de nombreuses familles consacrent de 30 % à 40 % de leur revenu pour se loger.
Depuis 30 ans, la crise du logement s’accentue et les prix montent inexorablement. Il serait temps de se poser la question de savoir s’il est utile de consacrer des dizaines de milliards par an au logement pour un résultat aussi lamentable.
La fin des aides à la pierre en 1977 par le gouvernement Barre, remplacées par les aides à la personne, n’a fait qu’accentuer le problème. Aujourd’hui, les APL et ALS représentent 16 milliards par an pour une efficacité douteuse sur le prix du logement. La politique d’austérité du gouvernement Valls va certainement diminuer les aides, mais par quoi seront-elles remplacées ? Par rien.
Si on considère l’histoire des politiques du logement dans les différents pays européens, le constat est clair : sans une politique volontariste de l’État, c’est-à-dire le financement par l’État de la construction, on ne sortira jamais de cette crise. Aux Pays-Bas, qui ont 2,5 fois plus de logements sociaux que la France, en Allemagne, qui a très peu de logements sociaux (sauf dans sa partie Est) mais dont les loyers sont en moyenne 2 fois moins chers que chez nous, c’est l’État qui est intervenu, et massivement.
Ce n’est pas le laisser-faire libéral qui permet la construction.