Mathilde Frémion vient de nous quitter dans sa 95e année.
Née en 1924 dans la région lyonnaise, Mathilde est la fille d’un ouvrier athée dont la santé décline peu à peu. Désemparée devant son hospitalisation et sa douleur, elle ne peut vivre sans agir activement pour le « salut » de son père. Elle entre alors au couvent à l’âge de 17 ans dans le seul objectif de lui venir en aide. De cet environnement nouveau mais aussi oppressif, autoritaire et intolérant, elle ne se libérera qu’au début des années 70. Celle qui était alors une petite nonne dévote a enduré les pires tourments, les bassesses les plus viles et l’incompréhension d’une hiérarchie rigide hostile à cet humanisme absolu qui ne l’a jamais quittée.
En 2000, elle raconte son histoire dans un livre intitulé « Pour mon père, pas pour dieu », écrit simplement avec les mots du cœur, ce même cœur qui l’a, après sa « libération », conduite vers René, son mari athée qu’elle a épousé en 1975. Son éloignement de la religion se poursuit alors de façon inéluctable pour la convaincre peu à peu de l’importance du militantisme pour la laïcité.
Voici ce qu’elle déclarait le 5 mars 2019 en recevant la médaille d’honneur de la ville de Mios en Gironde, où elle résidait depuis 1978 :
« Mon engagement laïque a été une découverte salvatrice après une trentaine d’années de vie monastique. Ces années ont été une alternance de rencontres, de frustrations, d’engagement sociaux en tant qu’enseignante, et d’endoctrinement. En 1970, brisée, perdue dans ces méandres obscurantistes, je romps définitivement avec l’église. Je commençais à réaliser que je n’étais pas faite pour être asservie et asservir les autres, mais pour partager, dans l’amour et le respect des autres. En fin de compte, je découvrais que j’étais laïque.
Nous étions un petit groupe à militer dans des mouvements de défense des familles et de la liberté de penser. Ce sont dans ces années que ma prise de conscience sociale s’est affermie.
En 1989 je fus cofondatrice de l’UFAL. Nous voulions construire un mouvement familial laïque indépendant, qui défende les intérêts de toutes les familles sans être lié ni ne rien devoir à aucun parti politique.
Ce ne fut pas “un long fleuve tranquille”, car nous avons rencontré l’hostilité des associations cléricales et réactionnaires, mais aussi celle des associations progressistes politisées.
Quand je vois aujourd’hui le chemin parcouru et la reconnaissance dont bénéficie l’UFAL, je suis fière d’y avoir apporté ma contribution. »
Mais Mathilde Frémion n’était pas simplement une « cofondatrice » qui avait participé à la création de l’UFAL. Elle était une figure majeure de notre mouvement : elle faisait partie des quelques personnes qui avaient permis cette création et ensuite son développement, avec André Fortané et Roger Labrusse.
En 2012, l’Assemblée générale de l’UFAL lui avait décerné le titre de « militante laïque d’honneur », et le 1er juin denier, elle avait tenu à être présente parmi la famille UFAL qui célébrait ses 30 ans d’existence, au travers d’une intervention filmée qui a bouleversé l’assemblée tant son énergie militante était éblouissante et communicative.
Le jour de sa mort, à 95 ans, elle était encore la secrétaire de l’UFAL de Mios.
Au revoir Mathilde, l’UFAL te doit beaucoup et ne t’oubliera pas.