Plan B ?
Depuis plusieurs mois, le prix de ce combustible, à 85 % produit en France, ne cesse de grimper et les hausses n’en finissent plus. En un an, le prix de la palette d’une tonne conditionnée en sac de 15 kg est passé d’environ 300 euros à plus de 600 ou 700 euros et la plupart des fournisseurs sont en rupture de stock et retardent les livraisons.
Avec la guerre en Ukraine, le prix du gaz (lorsqu’il n’est pas soumis au bouclier tarifaire comme en France), s’est envolé. La production d’électricité, en France, a diminué, en raison des difficultés techniques rencontrées sur certains réacteurs nucléaires et de la décision inopportune de fermer la centrale de Feisseinhem. Le tout dans un contexte d’inflation généralisée. Aussi, l’augmentation des coûts de l’énergie (électricité et gaz), du transport (carburants) et des matières premières (emballage) a une conséquence directe sur les difficultés d’approvisionnement en pellets et sur le prix du produit dans toute l’Union Européenne. « Pour produire une tonne de granulés, nous avons en ce moment un surcoût entre 100 et 130 euros, lié à la hausse générale et le prix de fabrication de la sciure de bois », explique Eric Vial, président de Propellet, l’association nationale du chauffage au granulé.
Un marché sous tension
Un autre phénomène explique l’augmentation des prix des pellets : la demande croissante. Entre 2020 et 2021, les ventes de poêles à granulés ont grimpé de 41 % (180 000 pièces). Celles des chaudières à granulés ont bondi de 120 % (32 000 pièces). Différents facteurs sont à l’origine de cette forte croissance du marché des appareils fonctionnant à l’énergie bois. Tout d’abord, depuis le 1er juillet 2022, il est interdit d’installer des chaudières au fioul ou au charbon. Il est vrai que les familles propriétaires de leur logement sont nombreuses à avoir entrepris des travaux d’amélioration énergétique de leur logement grâce au dispositif « Ma Prim rénov », principale aide à la rénovation énergétique depuis 2020 avec la TVA à 5,5 %, l’éco-prêt à taux 0. L’augmentation de la demande de pellets est donc très importante puisque de nombreux ménages ont fait le choix d’un mode de chauffage qui répond aux enjeux actuels en termes de baisse d’émissions de gaz à effet de serre et qui permet une plus grande indépendance énergétique.
Autosuffisance ?
La France est relativement indépendante dans son approvisionnement en pellets avec seulement 16 % d’importations et la construction de 15 nouvelles usines de granulation est prévue. La filière prévoit de fournir 1 million de tonnes supplémentaires d’ici 2024. Or, l’Europe connaît actuellement des tensions car certains pays (Royaume-Uni, Pays-Bas, Belgique, Danemark), face au prix élevé du gaz, intensifient l’usage de centrales électriques au granulé. Les quantités requises dans le secteur industriel sont plus importantes (17 millions de tonnes sur 35 millions de tonnes de consommation en Europe) que dans le secteur domestique et proviennent généralement d’Amérique du Nord car les approvisionnements de Russie ont cessé. D’autres pays d’Europe comme l’Italie, par exemple, qui ne dispose pas de l’énergie nucléaire sont également très en demande car le granulé est très développé sur le marché du chauffage (le pays ne produit que 13% de sa consommation). La quasi autosuffisance française aurait donc pu permettre d’éviter la tension mais certaines familles ont tendance à sur entreposer des pellets par peur du manque. De vils spéculateurs ont constitué des stocks pour les revendre sur Internet, ce qui alimente la pénurie et, donc, l’augmentation des prix.
Diagonale du vide
Face à cet afflux de demandes, les distributeurs de granulé ont fait le choix de réguler pour éviter de se retrouver dans une situation trop critique cet hiver. Un sujet « populaire et social » qui est « en train de monter très fort ». C’est ainsi que Dominique Potier, député Nupes de la Meurthe-et-Moselle, a qualifié la hausse du prix du pellet, devant la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, le 14 septembre 2022. Une situation qui pourrait financièrement impacter des ménages modestes à l’approche de l’hiver. « Ce phénomène m’est remonté à chaque fois que j’effectue un déplacement », a confirmé en retour le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, sollicité à ce sujet. Le patron de Bercy s’est ainsi dit « favorable à une aide spécifique sur le pellet », à destination des ménages ayant fait ce choix de chauffage « judicieux du point de vue environnemental ».
Nous ne pouvons que nous féliciter qu’un ministre prenne en compte les difficultés des familles de la diagonale du vide de la France périphérique qui sont souvent les grandes oubliées des mesures palliatives gouvernementales. Les aides à l’installation de chaudières à pellets doivent être étendues et couplées à un plan de soutien à la filière industrielle de fabrication en France qui, c’est un comble, pâtit de l’augmentation du gaz !
Article issu du numéro 90 d’ufal INFO dont le thème central est la problématique de l’énergie