Le courage politique ne connaît plus de bornes ! François Hollande vient de « rassurer » (selon Le Figaro) le congrès des maires de France (dont une minorité s’agite contre le mariage pour tous) en laissant entendre qu’ils pourraient invoquer leur « liberté de conscience » pour refuser de célébrer le mariage de couples du même sexe. C’est non seulement une reculade, mais une démolition de la logique laïque du projet de loi.
L’UFAL défend une conception laïque du mariage
Le projet de mariage pour tous, en effet, en élargissant l’accès au mariage civil à tous les couples sans distinction de préférences sexuelles, rompait un peu plus avec le mariage religieux. Il se fondait sur les principes communs à tous d’une République laïque et non sur les divers dogmes particuliers. À ce titre, l’UFAL le soutenait comme un premier pas, tout en regrettant ses insuffisances (accès à la PMA, égalité des droits du PACS et du mariage…).
Confondant « clause de conscience » et « liberté de conscience », le Président de la République a commis plus qu’une bourde : l’annonce d’une inconstitutionnalité dans les deux cas. Le principe constitutionnel de laïcité interdit « à quiconque de se prévaloir de ses croyances religieuses pour s’affranchir des règles communes régissant les rapports entre collectivités publiques et particuliers. » (Conseil Constitutionnel 19 novembre 2004, [505 DC]). Or le maire, comme Officier d’état civil, est astreint à une neutralité absolue. L’UFAL rappelle que, dans la sphère publique, les libertés religieuses des agents sont suspendues.
Quant à la « liberté de conscience », qui est simplement celle de croire ou de ne pas croire, elle ne concerne que les convictions. Les maires l’ont toujours eue, comme tous les citoyens, sans qu’elle modifie en rien leur comportement d’Officier d’état civil. Et si, en vertu de la même « conscience », aucun adjoint n’accepte de célébrer le mariage ?
L’oxymore qui tue
François Hollande est un virtuose de l’oxymore, cette figure qui associe deux termes antagoniques. Mais l’oxymore juridique tue ! Il avait déjà utilisé cette astuce pour torpiller « de l’intérieur » sa proposition 46 de candidat d’inscrire dans la Constitution le titre 1er de la loi de 1905… « sous réserve des règles particulières applicables en Alsace et Moselle » — autrement dit, la laïcité sous réserve de son contraire le Concordat = pas de laïcité du tout !
Le style, c’est l’homme. Dans la même veine, François Hollande déclare aux maires : « La loi s’applique pour tous… dans le respect, néanmoins, de la liberté de conscience. » Traduisons : certains sont plus égaux que d’autres devant la loi ; le mariage pour tous ne signifie pas le maire pour tous ; le principe constitutionnel de laïcité ne s’applique pas aux maires !
Si une telle aberration juridique est maintenue, c’est un torpillage en règle du mariage pour tous, une rupture de l’égalité d’accès des citoyens à un service public. L’UFAL rappelle que toute discrimination commise par une « personne dépositaire de l’autorité publique » en refusant « le bénéfice d’un droit accordé par la loi » est punie de « cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende » (article 432-7 du Code pénal). Il va falloir aussi changer le Code pénal !
L’UFAL, auditionnée par la commission des lois de l’Assemblée nationale le 22 novembre 2012, dénonce cette reculade politicienne. Les familles attachées à la laïcité ne pourront apporter leur soutien à tout projet mettant en œuvre cette prétendue « clause de conscience ».