Le projet de loi gouvernemental sur le mariage pour tous s’inscrit dans la voie du progrès social en répondant à un objectif d’égalité. Il ne concerne bien évidemment que le mariage civil et ne va pas créer de “bouleversement de civilisation” puisqu’il va seulement permettre l’égalité dont une partie de la population était jusqu’alors privée et ouvrir des droits, en particulier des droits protecteurs.
Les principes républicains sont confortés et le mariage religieux n’est pas concerné. Alors pourquoi donc Jean-François Copé (président contesté de l’UMP), Alain Escada (président de Civitas) et Virginie Merle, qui se fait appeler Frigide Barjot (co-organisatrice de La manif pour tous) appellent-ils tous à manifester à Paris le 13 janvier contre le projet de loi gouvernemental ?
Pour Civitas1, la réponse est simple et comprise dans le but même de l’association, qui est d’oeuvrer à “l’instauration de la Royauté sociale du Christ sur la France et les Français”. Alain Escada est dans la mouvance lefebvriste, c’est un ancien membre du Front National de Belgique et de l’association nationale-catholique “Belgique et chrétienté” qui avait mené un combat contre… l’adoption par les couples homosexuels. Les slogans homophobes et les violences qui ont accompagné la manifestation de Civitas le 18 novembre montre à ceux qui en doutaient que nous avons à faire à une synthèse de deux courants de l’anti-républicanisme français : l’extrême-droite et l’intégrisme catholique.
Pour les différents clergés, qui ont défilé avec Virginie Merle le 17 novembre, la motivation est d’ordre symbolique, car avec le projet de loi, c’est la fin définitive de la confusion qu’ils entretiennent entre mariage civil et mariage religieux qui se dessine. Un combat existentiel donc, qui prend pour cible une mesure qui ne les concerne en rien (contrairement aux manifestations pour l’école privée de 1984 par exemple) ! Mais c’est aussi l’occasion de mettre en application les nouvelles stratégies importées d’Espagne ou des États-Unis d’Amérique et de faire ouvertement alliance avec la droite réactionnaire dans un renouveau du cléricalisme parfaitement assumé.
Et que vient faire l’UMP dans cette affaire ? La stratégie de droitisation de Nicolas Sarkozy poursuivie par Jean-François Copé a ouvert un boulevard à l’aile droite de l’UMP, qui a fait des sujets fiscaux et sociétaux ses chevaux de bataille. Cette droite réactionnaire, qui n’a jamais complètement digéré les principes républicains et les droits de l’Homme, tient là un thème de choix pour affirmer son ordre moral et imposer ses clivages dans la recomposition en cours à droite.
Nous ne savons pas encore si le trio Copé – Escada – Barjot sera coude à coude derrière une même banderole le 13 janvier, puisque le caractère unitaire de la manifestation n’est pas encore établi, mais si tous appellent à manifester le même jour, c’est bien dans cette optique.