Lors du Grand Jury RTL du dimanche 27 janvier, Christiane Taubira a précisé les intentions du gouvernement au sujet du Livret de famille pour l’application de la loi sur le « mariage pour tous» : selon ses propos, le gouvernement souhaite garder les mentions « époux ou père » et «épouse ou mère », et pour cela se dirigerait vers la mise en place de trois livrets de famille différents (un pour les couples hétérosexuels, deux pour les couples homosexuels selon la filiation).
L’Ufal est atterrée par ce recul face aux manœuvres des opposants à la loi, recul qui met à mal le principe d’égalité pourtant à l’origine du projet.
En effet, pour l’Ufal, il est impensable que l’on puisse fournir des documents d’état civil différents selon l’orientation sexuelle des personnes concernées. Pire, la ministre a laissé entendre qu’il y aurait deux livrets de famille distincts pour les couples homosexuels, selon le type de filiation, biologique ou juridique, ce qui n’est pas le cas pour les couples hétérosexuels ! Cela est d’autant plus ridicule que le livret de famille est établi à l’occasion du mariage et complété par la suite. Les couples homosexuels devront-ils déclarer leurs intentions en matière de filiation lors de la célébration de leur mariage?
Cette nouvelle reculade à la veille des débats au Parlement se révèle catastrophique : sur la forme d’abord, puisqu’elle donne des gages aux opposants qui agitent la fiction d’un « bouleversement du quotidien » des couples hétérosexuels ; sur le fond ensuite, puisqu’elle instaure une discrimination à forte portée symbolique.
La droite réactionnaire, qui s’est préparée à une guérilla parlementaire au moins aussi importante que celle qu’elle a menée contre le pacs, s’est engouffrée dans la brèche en prenant appui sur cette annonce malheureuse pour réclamer — autre mesure discriminatoire — un «contrat d’union spécifique aux couples homosexuels » afin de leur interdire la possibilité d’un mariage civil.
Les homosexuels doivent avoir droit au même livret de famille que les hétérosexuels lorsqu’ils se marieront, sans marquage discriminatoire d’aucune sorte !
Tous les parents doivent avoir droit au même livret de famille, sans discrimination selon le type de filiation dont relèvent leurs enfants (ce qui, de surcroit, introduirait une discrimination sur les enfants eux-mêmes ! ).
L’Ufal demande donc l’abandon de ce projet de multiples livrets de famille, totalement contraire au principe d’égalité et donc anti-républicain car il institue des familles à géométrie variable en créant une classification totalement inacceptable. En réalité, ce projet ne sert qu’à donner des gages aux opposants à la loi, nostalgiques de la société patriarcale du XIXe siècle, et il bloque toutes les évolutions du Code civil dont le projet de loi est pourtant l’occasion : aller vers davantage d’égalité entre tous les citoyens, les enfants et leurs familles en leur assurant un même statut et une identique reconnaissance devant la loi.