Le 9 décembre 1905 était votée la loi de séparation des églises et de l’Etat, fondement, avec les lois scolaires des années 1880, de la laïcité de la République française. L’UFAL, avec plusieurs autres associations laïques, a choisi de célébrer cet anniversaire, en organisant ou en prenant part à diverses manifestations sur l’ensemble du territoire. Mais elle entend en même temps attirer l’attention de tous les Républicains sur les menaces constantes qui pèsent sur la laïcité. Contrairement aux propos lénifiants officiellement tenus (notamment par le président de l’Observatoire gouvernemental de la laïcité), il y a bien risque d’érosion de ce pilier de notre République qu’est la laïcité. L’actualité récente en témoigne.
- Après la participation du Premier ministre à une cérémonie de « canonisation » à Rome, on a pu remarquer la complaisance des représentants de la République lors de la visite du chef de l’église catholique au Parlement européen, à Strasbourg. Le pontife n’a pas manqué d’y rappeler son opposition dogmatique à une fin de vie digne, et aux droits sexuels et reproductifs des femmes –alors que nous célébrons les 40 ans de notre loi sur l’IVG.
- Les rapports mettant en cause la laïcité, au nom d’une « société inclusive » ou de la « lutte contre les discriminations » se succèdent : rapport Tuot de février suivi de 5 rapports–tous retirés à la sauvette du site du Premier ministre ; rapport Benbassa – Lecerf (Sénat, 12 novembre 2014). Sont proposés notamment : l’abrogation de la loi du 15 mars 2004 réglementant le port des signes religieux par les élèves de l’école publique, des statistiques ethniques, la discrimination religieuse jusqu’au cimetière, etc.
- La ministre de l’éducation nationale est venu semer le désordre dans un dossier pourtant bien bordé juridiquement (notamment par une étude du Conseil d’Etat) : celui des parents accompagnateurs de sorties scolaires, qu’elle entendait autoriser systématiquement à arborer des signes religieux, soit exactement l’inverse de la Haute juridiction ! Elle vient de faire partiellement machine arrière en affirmant que la circulaire Chatel de 2012 (restreignant l’affichage religieux des parents accompagnateurs) était toujours valide… tout en incitant à ne pas l’appliquer, au nom « du dialogue, et non de la fermeture »1. Comme si la laïcité scolaire, condition de la construction de la liberté de conscience des élèves, était fermeture, et non émancipation ! Décidément, la « laïcité ouverte » poursuit ses ravages !
- La question des crèches apposées dans des locaux municipaux (en violation de la loi, comme l’a rappelé un tribunal administratif) est venue réveiller d’autres vieux démons : la défense de l’affichage des signes religieux chrétiens au nom des « traditions » et de « l’identité culturelle française », la laïcité n’étant plus invoquée que contre les signes musulmans ! Discours typique de l’extrême-droite, comme à Béziers.
Décidément, il y a du pain sur la planche pour les Républicains, animés par leur conviction laïque : la neutralité religieuse de la sphère publique est le seul moyen de réaliser l’égalité entre tous, sans distinctions identitaires ou culturelles, base de la concorde dans le corps politique et la société.
- Citation complète : « L’école doit être protégée de toute forme de prosélytisme comme des provocations de l’extrémisme religieux. C’est pourquoi les principes posés par la circulaire Chatel sont toujours applicables pour s’opposer à ces dérives. Mais, dès lors que le Conseil d’Etat a rappelé que les parents accompagnateurs ne sont pas des collaborateurs du service public et qu’à ce titre ils ne sont pas soumis à la neutralité religieuse, la bonne volonté de parents qui, par leur volontariat à encadrer une sortie scolaire, manifestent leur intérêt pour la scolarité de leur enfant et leur désir de coopération avec l’école doit rencontrer le dialogue et non la fermeture. Je suis convaincue que nous défendrons plus efficacement la laïcité et l’égalité dans une école capable de rassembler et de créer de la coopération et de la confiance. » [↩]