Contre le mariage pour tous, l’épiscopat catholique se déchaîne. Mgr Vingt-Trois, lors d’une « messe de rentrée des députés et sénateurs » — qui aurait dû rester purement privée — vient de renouer avec le cléricalisme des siècles passés. Il incite les Parlementaires à ne pas suivre leur parti, et à « voter selon leur conscience » — c’est-à-dire à obéir à l’église. Il y a 40 ans, une injonction semblable était brandie contre la loi sur l’IVG : avec constance, l’épiscopat français s’oppose aux évolutions de la société. Pour ne pas être en reste, le Grand Rabbin de France a, lui aussi, pris une position publique hostile.
L’UFAL dénonce ces ingérences intolérables des représentants religieux dans les affaires publiques, et rappelle que l’État et les églises sont séparés depuis 1905. La liberté d’expression n’autorise pas les ministres des cultes à intervenir en tant que tels dans le débat public : toute réunion politique dans les lieux de culte, toute provocation à résister aux « actes légaux de l’autorité publique » (dont fait partie le débat parlementaire sur le mariage civil) sont prohibées et passibles de peines contraventionnelles ou correctionnelles (titre V de la loi du 9 décembre 1905, articles 26 et 35 et 36). Si Monsieur Vingt-Trois, citoyen français, a parfaitement le droit de soutenir publiquement les opposants au mariage pour tous, en revanche Monseigneur Vingt-Trois, organisateur de l’exercice du culte catholique en vertu des articles 1 et 4 de la loi de 1905, doit s’abstenir d’intervenir ès qualités dans le débat.
Ces principes de la loi française, trop souvent oubliés, doivent être rappelés. En l’espèce, l’épiscopat pratique le lobbyisme du « conformisme de la pensée » qu’il dénonce chez les partisans de l’égalité du droit au mariage. La liberté de culte pourrait bien n’être que le paravent d’une entreprise politicienne que la droite militante se prépare à relayer, comme elle l’avait fait de la question de l’école privée en 1984.
L’UFAL rappelle que les libertés religieuses s’arrêtent à la porte de la sphère publique, et que la liberté de conscience des citoyens (même croyants) est placée par la loi avant celle de l’exercice des cultes.
L’UFAL soutient le mariage pour tous, comme un premier pas vers un contrat unique d’union civile. Mais surtout, elle entend défendre toutes les formes de famille, et les droits de tous les enfants. Qu’on le veuille ou non, la famille composée d’un homme et d’une femme, mariés, fidèles, et ne se séparant jamais, est en voie de disparition. S’obstiner à en faire le modèle obligé de « la société », voire de « l’humanité », selon les termes de Mgr Vingt-Trois, revient à dénier le droit à l’existence et au bonheur de toutes les autres familles : monoparentales, recomposées, séparées, et parfois homoparentales. Au-delà de la stigmatisation choquante du « mariage gay », l’épiscopat manifeste son mépris et son rejet de la majorité des familles.
L’UFAL regrette d’autant plus que la majorité des associations représentées au conseil d’administration de l’UNAF (Union nationale des associations familiales, interlocuteur officiel des Pouvoirs publics) aient cru bon, en bons soldats de la réaction et des valeurs chrétiennes, de voter contre le mariage pour tous, en reprenant les consignes et les arguments du lobby clérical. Seules les associations familiales laïques ont fait preuve d’indépendance en soutenant l’égalité de tous devant le mariage, et seule l’UFAL a défendu le droit à la procréation médicalement assistée pour les couples du même genre.