Monsieur le Ministre de l’Intérieur,
L’Union des FAmilles Laïques a pris connaissance avec surprise de votre communiqué du 6 juin adressé « à l’ensemble des Français de confession musulmane » à l’occasion du ramadan.
Selon l’article 2 de la loi de 1905, « la République ne reconnaît… aucun culte », et a l’obligation de traiter tous les citoyens sur un strict pied d’égalité, quelles que soient leurs convictions. Il nous paraît au-dessus des forces d’un ministre, aurait-il dans ses services un « bureau des cultes », d’adresser 66 millions de communiqués à chacun de ses concitoyens : l’avantage de la laïcité était de vous dispenser de cette longue et lourde tâche. Toute autre attitude est en effet, non seulement contraire à la Constitution d’une République laïque, mais discriminatoire à l’égard des autres cultes, convictions, et négatrice de la multiplicité infinie des choix individuels de conscience.
Ainsi, votre volonté de « renforcer la fraternité entre les Français de toutes confessions » méconnaît le principe constitutionnel de liberté de conscience, celle « de croire ou de ne pas croire ». La fraternité républicaine doit s’exercer entre tous les Français, « sans distinction d’origine, de race ou de religion » (Constitution, art. 1er), ou de conviction philosophique : elle ne saurait ainsi exclure les incroyants. Nous nous permettons de rappeler que, selon l’enquête de l’INED Trajectoires et origines (2015), 45% des habitants de France métropolitaine se déclarent « sans religion », ce qui constitue le groupe le plus important devant les catholiques, dont par ailleurs 25% disent que la religion n’a aucune importance pour eux.
La laïcité, ce n’est le dialogue entre les seules religions, et surtout pas le tête-à-tête entre les pouvoirs publics et l’une ou l’autre d’entre elles. C’est trouver le creuset où vivent croyants, agnostiques, athées, déistes, ou indifférents. S’en tenir au triptyque républicain est bien suffisant.
L’UFAL, attachée comme le voulait Jean Jaurès à lier le combat laïque et le combat social, regrette de se trouver sur des chemins divergents avec un pouvoir qui se réclame de la gauche.