Moins d’un an après avoir réformé la politique familiale et durci les conditions de soutien financier aux familles, le gouvernement entend désormais faire des économies sur les fonds consacrés à l’accueil de la petite enfance. Sous prétexte que la branche famille n’a pas consommé 100% du Fonds National d’Action Sociale (FNAS) en 2013, le gouvernement entend « débaser » le FNAS 2014-2017 à due proportion, soit 243 millions d’euros par an, ce qui représente un manque à gagner de près de 1,5 milliard d’euros à l’horizon 2017. Cette petite économie (car elle ne réglera en rien la question des déficits sociaux) aura malheureusement de grandes conséquences sur les investissements et le financement des établissements d’accueil du jeune enfant. Car le FNAS est le budget qui permet, entre autres, aux Caisses d’Allocations Familiales de participer de manière essentielle aux investissements et aux frais de fonctionnement des structures d’accueil collectif : crèches, haltes-garderies …
La France connaît pourtant un déficit criant de places de crèches qui nuit gravement à la qualité de vie des familles. On estime qu’il manque environ 400 000 places crèches en France pour satisfaire le besoin des familles, particulièrement en Région parisienne. Le gouvernement avait pourtant fait un geste en inscrivant dans la Convention d’Objectifs et de Gestion de la branche famille, l’objectif d’ouverture de 275 000 places d’accueil : 100 000 places de crèches (seulement), 100 000 places d’assistante maternelle, et 75 000 places supplémentaires en école maternelle. L’UFAL a eu l’occasion de dire qu’il s’agit d’un effort notoirement insuffisant. Cependant par sa décision comptable d’amputer le FNAS, même cet objectif risque de ne pas être réalisable.
Pourtant, cette sous-exécution du Fonds National d’action sociale n’est aucunement due à un manque de besoin ou à l’incurie des Caisses d’Allocations Familiales. Outre les raisons conjoncturelles comme la signature tardive de la COG en juillet 2013, cette sous-exécution provient notamment de l’explosion du coût de création d’une place de crèche (+ 89,9 % entre 2000 et 2013) et des difficultés des municipalités à s’engager financièrement en direction de la petite enfance, qui plus est en période électorale. Or, sans cofinancement de la part des municipalités, les CAF ne peuvent pas financer à elles seules les créations de structures d’accueil collectif.
L’UFAL dénonce cette économie inepte décidée par le gouvernement, prise sans concertation ni aucune cohérence avec ses engagements en faveur de l’accueil collectif du jeune enfant. L’UFAL a toujours considéré que les structures d’accueil collectif du jeune enfant doivent être considérées comme un investissement social essentiel qui participe de l’amélioration de qualité de vie des familles et de la socialisation de l’enfant. Plus encore, il s’agit du principal vecteur de conciliation entre vie familiale et professionnelle et d’égalité hommes / femmes. Les familles plébiscitent les solutions de garde … lorsqu’elles y ont accès. Le recours au congé parental ne constitue, pour beaucoup de familles, qu’un pis aller qui aggrave de surcroît l’éloignement des femmes du monde du travail ou freine leur progression professionnelle. Rappelons que 96% des congés parentaux sont pris par des femmes.
Or, le gouvernement vient d’annoncer dans le même temps son intention de réduire de 3 à 1 an la durée du congé parental à compter du 2e enfant… Cette mesure pourrait s’entendre à la rigueur si l’offre de structures collectives était suffisante. Mais en attaquant sur les deux fronts du financement des crèches et du congé parental, l’intention du gouvernement est tacitement d’orienter les parents d’enfants en bas âge vers le réseau d’assistantes maternelles, car elles coûtent nettement moins cher en investissements que les crèches … mais beaucoup plus cher pour les familles. Et ce n’est pas pour s’arranger avec l’explosion actuelle du taux horaire des assistantes maternelles dans les zones où l’offre de mode de garde est faible.
Une fois encore, les (petits) calculs comptables du gouvernement et la recherche frénétique d’économies dans le domaine social risquent de plonger bon nombre de familles dans une situation intenable.