Alors que l’ensemble de la protection sociale solidaire est sous l’emprise du processus de marchandisation et de privatisation lancé depuis une trentaine d’années par le Consensus de Washington et relayé par les politiques néolibérales nationales, voilà que Nicolas Sarkozy décide d’aborder les retraites après avoir fait reculer le principe de solidarité sur la santé et l’assurance-maladie aux profits des actionnaires des structures hospitalières privées, de l’UNOCAM1 et de l’industrie pharmaceutique. Dix-sept ans déjà de contre-réformes.. Dès le retour de la droite en 1993 permis par une gestion calamiteuse pour les couches populaires (ouvriers et employés) et pour l’ensemble des salariés des Mitterrand, Rocard et Bérégovoy, la durée de cotisation passe de 37,5 annuités à 40 ans et le calcul du salaire de référence servant au calcul de la retraite s’allonge des 10 aux 25 meilleures années. Last but not least le montant des retraites n’est plus indexé sur les salaires mais sur les prix. Les contre-réformes de 1993 et celle qui suivent de 1994-1996, entraîneront mécaniquement une diminution de 20 points (de 78 % à 58 % du salaire moyen net) de la retraite moyenne des salariés du secteur privé dans l’avenir. En 2003, Fillon instruit par l’échec de Juppé (qui s’attaqua à la fonction publique et aux entreprises nationalisées) s’attaque uniquement aux salariés et passe ces derniers à 40 ans d’annuités. En 2007, le gouvernement remet le couvert et impose les 40 annuités aux salariés des régimes spéciaux.
L’UFAL a déjà (voir Ufal Flash n°89) montré qu’une politique alternative est possible. Mais qui est possible que si on revient à un partage des richesses du début des années 80 entre d’une part les revenus du travail et les cotisations sociales et d’autre part les profits dont la déformation a dépassé les 9,3 points du PIB ce qui correspond à plus de 170 milliards d’euros par an.
Aujourd’hui Nicolas Sarkozy veut attaquer le principe de la répartition pour privatiser les retraites par un accroissement de la capitalisation. Que dans de nombreux pays dont la Grande-Bretagne, les organisations de capitalisation aient perdu jusqu’à 50 % de leur valeur du fait de la crise, du niveau des dividendes aux actionnaires ou de frais de gestion exorbitants, n’a aucune importance, il faut marchandiser et privatiser la retraite.
Martine Aubry pour le PS et Jean-Vincent Placé pour Europe Écologie ont déjà déclaré, comme pour aider Nicolas Sarkozy, que l’âge légal de départ à la retraite « va aller très certainement vers 61 ou 62 ans » (pour la première) et que « l’allongement de la durée du travail est inéluctable » (pour le second) ! Bien sûr, ils déclarent que pour accepter cela, il faudra que le gouvernement accepte de lâcher sur la « pénibilité du travail ». mais le mal est fait ! Comment peuvent-ils annoncer cela alors que le chômage frappe de plus en plus les plus de 50 ans, que la durée réelle d’une carrière est de 37 ans et que donc, mathématiquement, l’allongement de la durée légale diminue le montant des retraites? Et « l’autre gauche » qui ne partage pas ces propositions, quand va-t-elle engager une vigoureuse campagne d’éducation populaire tournée vers l’action pour défendre la protection sociale solidaire ?
Qu’on y prenne garde, les projets de « troisième étage de capitalisation » incluent le « siphonnage » des deux premiers étages comme dans le leurre que constitue l’« épargne retraite ». Un autre leurre est le modèle suédois et ses comptes « notionnels ». Avec ce système, on ne sait plus à l’avance le montant de nos retraites ni quand on pourra partir en retraite. En fait , c’est un système qui avantage les patrons car il s’autorégule par la baisse des retraites et l’allongement de la durée légale de travail. Mais chaque cas est individuel, il n’y a donc plus de de place pour les revendications collectives en matière de retraite. Il n’y aura plus de solidarité intergénérationnelle, l’État pourra instaurer la charité institutionnalisée pour les plus démunis. Tant pis pour les femmes et les chômeurs, car leurs retraites seront calculées sur les années effectivement travaillées dans l’entreprise.
Y a-t-il une fatalité démographique ?
Disons-le tout net, non ! Car avec une aggravation de la crise du capitalisme, ce sont les déficits publics qui nous mettront en difficulté et pas les retraites. Une croissance de 1,7 % par an fait doubler les richesses en 40 ans, soit une augmentation de 1 700 milliards dont un peu plus de 200 milliards seront nécessaires pour les retraites ! Il y a bien là possibilité de financer les 63 % de retraités supplémentaires (passage de 13 millions en 2007 à 21 millions en 2050) ! Bien sûr à condition de ne pas sanctuariser la déformation de la valeur ajoutée notée plus haut.
Rajoutons à cela que pour moitié cette augmentation est due au baby-boom et qu’à partir de 2036, avec l’arrivée des « classes creuses », le nombre de retraités diminuera rapidement. Pour la seconde moitié, due à l’augmentation de l’espérance de vie, le Conseil d’orientation des retraites (COR) 2007 vient de calculer un allongement de l’espérance de vie de 1,1 ans tous les 10 ans soit 0,44 trimestres tous les ans ce qui infirment les chiffres du MEDEF d’une trimestre tous les ans. Encore une fois, les arguments du MEDEF tombent à l’eau.
Continuons avec les chiffres tant aimés par les bac +35 de la finance internationale qui essayent de nous enfumer du haut de leur piédestal.
Le COR 2007 estime que le solde migratoire passera de 50 000 à 100 000 personne chaque année.
Quand les dirigeants du turbocapitalisme ont essayé d’organiser les scenarii catastrophe, ils se sont basés sur un taux de fécondité des femmes de 1,8 – criant au loup parce que les femmes avaient leur premier enfant deux ans plus tard (aujourd’hui 29,9 ans). Errare humanum est, le recul de l’âge au premier enfant n’a pas empêché de faire monter le taux de fécondité des Françaises à 2 ! Avec « environ 69 personnes de 60 ans et plus pour 100 personnes de 20 à 59 ans », nous sommes au-delà des chiffres de 2006 : « 47 personnes de 60 ans et plus pour 100 personnes d’âge actif ». Mais nous sommes très loin des scenarii catastrophe agités à la fin des années 1990 et au début des années 2000 : 81 personnes de 60 ans et plus pour 100 personnes d’âge actif. Cela signifie que la population en âge de travailler ne subirait donc pas, entre 2006 et 2050, la diminution de 4,1 millions prévue par ces mêmes scenarii catastrophes, mais resterait stable.
Quels choix ?
Le rapport du COR de 2001 donnait trois choix :
- ne pas augmenter les cotisations retraites et ne pas diminuer le montant des retraites. Dans ce cas, il fallait augmenter de 9 ans la durée de cotisation.
- ne pas augmenter les cotisations retraites et ne pas allonger la durée de cotisation. Dans ce cas, le montant moyen des retraites diminuerait de 78 % du salaire net moyen à 43 % de ce même salaire net.
- ne pas allonger la durée de cotisation, ne pas baisser le montant des retraites mais augmenter de 15 points le montant des cotisations retraites entre 2003 et 2040.
Jamais la troisième option présentée par le COR n’a été soumise au débat public, pourquoi ? N’est-ce pas la solution la plus acceptable pour les citoyens et leurs familles ? 15 points d’augmentation en un peu moins de 40 ans, cela représente 0,40 point d’augmentation par an. Qui pourrait prétendre qu’une augmentation de 0,25 point de la part patronale des cotisations retraites et de 0,15 point de la part salariale n’est pas préférable à un allongement de 9 ans de la durée de cotisation ou à une baisse de 25 points du montant des retraites ? Et pourquoi ne pas mettre toute l’augmentation sur la part patronale jusqu’à la suppression de la déformation de la valeur ajoutée notée plus haut ?
Bernard Teper
L’UFAL a déjà [lien avec UFAL Flash N°89( voir www.ufal.info] montré qu’une politique alternative est possible. Mais qui est possible que si on revient à un partage des richesses du début des années 80 entre d’une part les revenus du travail et les cotisations sociales et d’autre part les profits dont la déformation a dépassé les 9,3 points du PIB ce qui correspond à plus de 170 milliards d’euros par an.
Aujourd’hui Nicolas Sarkozy veut attaquer le principe de la répartition pour privatiser les retraites par un accroissement de la capitalisation. Que dans de nombreux pays dont la Grande-Bretagne, les organisations de capitalisation aient perdu jusqu’à 50 % de leur valeur du fait de la crise, du niveau des dividendes aux actionnaires ou de frais de gestion exorbitants, n’a aucune importance, il faut marchandiser et privatiser la retraite.
Martine Aubry pour le PS et Jean-Vincent Placé pour Europe Écologie ont déjà déclaré, comme pour aider Nicolas Sarkozy, que l’âge légal de départ à la retraite « va aller très certainement vers 61 ou 62 ans » (pour la première) et que « l’allongement de la durée du travail est inéluctable » (pour le second) ! Bien sûr, ils déclarent que pour accepter cela, il faudra que le gouvernement accepte de lâcher sur la « pénibilité du travail ». mais le mal est fait ! Comment peuvent-ils annoncer cela alors que le chômage frappe de plus en plus les plus de 50 ans, que la durée réelle d’une carrière est de 37 ans et que donc, mathématiquement, l’allongement de la durée légale diminue le montant des retraites? Et « l’autre gauche » qui ne partage pas ces propositions, quand va-t-elle engager une vigoureuse campagne d’éducation populaire tournée vers l’action pour défendre la protection sociale solidaire ?
Qu’on y prenne garde, les projets de « troisième étage de capitalisation » incluent le « siphonnage » des deux premiers étages comme dans le leurre que constitue l’« épargne retraite ». Un autre leurre est le modèle suédois et ses comptes « notionnels ». Avec ce système, on ne sait plus à l’avance le montant de nos retraites ni quand on pourra partir en retraite. En fait , c’est un système qui avantage les patrons car il s’autorégule par la baisse des retraites et l’allongement de la durée légale de travail. Mais chaque cas est individuel, il n’y a donc plus de de place pour les revendications collectives en matière de retraite. Il n’y aura plus de solidarité intergénérationnelle, l’État pourra instaurer la charité institutionnalisée pour les plus démunis. Tant pis pour les femmes et les chômeurs, car leurs retraites seront calculées sur les années effectivement travaillées dans l’entreprise.
Y a-t-il une fatalité démographique ?
Disons-le tout net, non ! Car avec une aggravation de la crise du capitalisme, ce sont les déficits publics qui nous mettront en difficulté et pas les retraites. Une croissance de 1,7 % par an fait doubler les richesses en 40 ans, soit une augmentation de 1 700 milliards dont un peu plus de 200 milliards seront nécessaires pour les retraites ! Il y a bien là possibilité de financer les 63 % de retraités supplémentaires (passage de 13 millions en 2007 à 21 millions en 2050) ! Bien sûr à condition de ne pas sanctuariser la déformation de la valeur ajoutée notée plus haut.
Rajoutons à cela que pour moitié cette augmentation est due au baby-boom et qu’à partir de 2036, avec l’arrivée des « classes creuses », le nombre de retraités diminuera rapidement. Pour la seconde moitié, due à l’augmentation de l’espérance de vie, le Conseil d’orientation des retraites (COR) 2007 vient de calculer un allongement de l’espérance de vie de 1,1 ans tous les 10 ans soit 0,44 trimestres tous les ans ce qui infirment les chiffres du MEDEF d’une trimestre tous les ans. Encore une fois, les arguments du MEDEF tombent à l’eau.
Continuons avec les chiffres tant aimés par les bac +35 de la finance internationale qui essayent de nous enfumer du haut de leur piédestal.
Le COR 2007 estime que le solde migratoire passera de 50 000 à 100 000 personne chaque année.
Quand les dirigeants du turbocapitalisme ont essayé d’organiser les scenarii catastrophe, ils se sont basés sur un taux de fécondité des femmes de 1,8 – criant au loup parce que les femmes avaient leur premier enfant deux ans plus tard (aujourd’hui 29,9 ans). Errare humanum est, le recul de l’âge au premier enfant n’a pas empêché de faire monter le taux de fécondité des Françaises à 2 ! Avec « environ 69 personnes de 60 ans et plus pour 100 personnes de 20 à 59 ans », nous sommes au-delà des chiffres de 2006 : « 47 personnes de 60 ans et plus pour 100 personnes d’âge actif ». Mais nous sommes très loin des scenarii catastrophe agités à la fin des années 1990 et au début des années 2000 : 81 personnes de 60 ans et plus pour 100 personnes d’âge actif. Cela signifie que la population en âge de travailler ne subirait donc pas, entre 2006 et 2050, la diminution de 4,1 millions prévue par ces mêmes scenarii catastrophes, mais resterait stable.
Quels choix ?
Le rapport du COR de 2001 donnait trois choix :
-
ne pas augmenter les cotisations retraites et ne pas diminuer le montant des retraites. Dans ce cas, il fallait augmenter de 9 ans la durée de cotisation.
-
ne pas augmenter les cotisations retraites et ne pas allonger la durée de cotisation. Dans ce cas, le montant moyen des retraites diminuerait de 78 % du salaire net moyen à 43 % de ce même salaire net.
-
ne pas allonger la durée de cotisation, ne pas baisser le montant des retraites mais augmenter de 15 points le montant des cotisations retraites entre 2003 et 2040.
Jamais la troisième option présentée par le COR n’a été soumise au débat public, pourquoi ? N’est-ce pas la solution la plus acceptable pour les citoyens et leurs familles ? 15 points d’augmentation en un peu moins de 40 ans, cela représente 0,40 point d’augmentation par an. Qui pourrait prétendre qu’une augmentation de 0,25 point de la part patronale des cotisations retraites et de 0,15 point de la part salariale n’est pas préférable à un allongement de 9 ans de la durée de cotisation ou à une baisse de 25 points du montant des retraites ? Et pourquoi ne pas mettre toute l’augmentation sur la part patronale jusqu’à la suppression de la déformation de la valeur ajoutée notée plus haut ?
- Union nationale des organismes complémentaires à l’assurance-maladie, qui regroupe les firmes multinationales de l’assurance, les instituts de prévoyance des amis de Guillaume Sarkozy, et de grandes mutuelles qui ont décidé de participer au dépeçage de la Sécurité sociale en troquant le principe de solidarité (cotisations proportionnelles aux revenus et à chacun selon ses besoins) pour la gestion par le risque (cotisations forfaitaires et fonction du risque maladie). [↩]