Dans une tribune au Parisien – Aujourd’hui en France, plus de 50 associations et collectifs demandent que les personnes atteintes de mucoviscidose, d’une cardiopathie, d’une myopathie, d’un diabète compliqué ou en obésité morbide «puissent bénéficier d’arrêts dérogatoires avec droit au chômage partiel».
Par plus de 50 associations d’usagers de santé et collectifs
« Alors que le risque de mourir de la Covid-19 est pour les personnes en âge de travailler et en bonne santé bien inférieur à 1%, pour celles et ceux qui sont atteints d’une ou plusieurs maladies chroniques, il est bien plus élevé : ils s’appellent Corinne, Justin, Laïla… Ils sont secrétaire, ouvrier, banquier… Ils sont atteints de mucoviscidose, d’une cardiopathie, d’une myopathie, d’un diabète compliqué ou en obésité morbide, et doivent retourner sur leur lieu de travail.
Entre le 17 mars et le 31 août, on leur a dit de se protéger « quoi qu’il en coûte », afin de ne pas attraper le virus, d’en mourir, ou de risquer l’hospitalisation et la réanimation. Un appel à la responsabilité individuelle, heureusement accompagné d’une indemnisation, leur ont permis, ainsi qu’aux proches résidant sous le même toit, de s’isoler strictement. Ils ignoraient cependant que la durée de l’épidémie conduirait l’Etat à la stratégie du vivre avec et que l’ennemi d’hier allait devenir le compagnon d’aujourd’hui.
Alors qu’en mars peu de connaissances existaient sur le niveau de risque auquel ils étaient soumis, au fil des mois et de la propagation de l’épidémie dans le monde, les données se sont accumulées, et de nombreux pays, sur des bases scientifiques plus solides, ont pu définir les critères de fragilité ou d’extrême fragilité.
Contrairement à d’autres pays, en France la démarche de définir les critères de fragilité ou d’extrême fragilité vis-à-vis du virus a été jugée trop complexe par le Haut Conseil de la santé publique (HSCP). Plus grave encore, alors que l’épidémie connaissait une recrudescence, au cœur de l’été, ses experts recommandaient le retour au travail de toutes les personnes vulnérables en raison de cette difficulté à identifier les plus fragiles.
En cette rentrée 2020, la protection de la santé des plus vulnérables a donc été abandonnée par décret. En 2 jours, elles n’ont plus été considérées vulnérables à l’exposition au risque de la Covid-19. L’Etat n’étant pas à une contradiction près, les personnes vulnérables ont été plus que jamais encouragées à prendre toutes leurs précautions et à limiter leurs contacts. Cette incohérence, au regard du rebond de l’épidémie, a d’ailleurs été relevée par le président du Conseil scientifique, Jean-François Delfraissy, lors de son audition au Sénat. Rappelons ici que la protection de la santé a une valeur constitutionnelle.
Que retenir de ces injonctions paradoxales, alors que les clusters en entreprises se multiplient ? Et comment doivent réagir les associations de patients qui essuient un rejet, par le gouvernement, de leurs propositions pour protéger les travailleur.se.s vulnérables contraints de retourner au travail ?
Comment se protéger alors que les travailleur.se.s vulnérables ne peuvent plus compter sur la solidarité nationale et que leur employeur a la liberté de leur refuser le télétravail, même si le poste s’y prête ?
Comment se protéger et suivre les recommandations du HCSP dans les transports en commun, alors que la distanciation n’y est pas respectée et qu’aucune alternative n’est offerte aux personnes vulnérables qui se rendent au travail ?
Pour ces citoyen.ne.s présentant un risque de formes graves de Covid-19, il reste le choix entre rester à l’abri avec moins de revenus, voire renoncer à leur emploi, ou prendre le risque de contracter la maladie et de développer une forme grave. Et pour les proches cohabitants il reste l’angoisse de pouvoir transmettre le virus.
Nous refusons que soient abandonnés celles et ceux d’entre nous qui, par la magie d’un décret, passent du statut de personnes vulnérables à celui d’actifs, sommés de reprendre le chemin du travail alors que les risques qu’ils encourent sont toujours présents.
Nous refusons que ces personnes, vulnérables en raison de leur état de santé, soient considérées comme des dommages collatéraux acceptables au motif du rebond économique.
Nous demandons la révision du décret du 29 août 2020, sur la base des données scientifiques disponibles. En l’état, il est indispensable que ces personnes puissent bénéficier d’arrêts dérogatoires avec droit au chômage partiel. Toutes ne souhaiteront pas le faire mais il leur appartient – à elles seules – d’apprécier avec leur médecin le rapport bénéfice risque. Car, en définitive, elles seront les seules à devoir en assumer les conséquences. Nous refusons l’abandon des valeurs de solidarité et de protection des plus fragiles, qui sont des fondements de notre société. Quoi qu’il en coûte, vivre avec le virus ne peut pas se faire au prix d’un sacrifice des plus fragiles. »
Les signataires
A.S.B.H, Actions Traitements, ADMD, AFA Crohn RCH France, AFGS, AFH, AFM-Téléthon, AFVD, AFVS, Aides, Airas, Alliance du cœur, Alliance maladies rares, Amadys, Amalyste, Andar, APF France Handicap, ASFC, Association française des polyarthritiques et des rhumatismes inflammatoires chroniques, Association Gregory Lemarchal, Autisme France, CNAFC, Collectif handicaps, Conseil aide & défense des usagers de la santé, Epilepsie France, Fédération française sésame autisme, FFCM, FFD, FGCP, Fibromyalgie France, Fibromyalgie SOS, Fnapsy, FNAR, France Alzheimer, France Assos Santé, France Parkinson, France Rein, La Fnath, Le Lien, La Ligue nationale contre l’obésité, Le Planning familial, Ligue nationale contre le cancer, Renaloo, Réseau environnement santé, SOS hépatites, Transhépate, UAFMLV, UFC-Que choisir, UnaFam, Union des familles laïques, Unsed, Vaincre la mucoviscidose.