Édito du Rédacteur en chef d’UFAL Info, Nicolas Pomiès.
Le compte-rendu du Conseil des ministres du 10 octobre 2018 concernant le dépôt du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) est très clair sur la doctrine qui guide le Gouvernement pour son établissement. Il y est en effet écrit que ce « PLFSS 2019 s’inscrit tout d’abord dans la continuité des décisions prises pour libérer l’activité économique ».
L’objectif assigné à la Sécurité sociale n’est donc plus comme à sa création en 1945 de « garantir les travailleurs et leurs familles contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gain, de couvrir les charges de maternité et les charges de famille qu’ils supportent ».
Or, le vieillissement est bien un risque officiellement identifié : l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) relève que le vieillissement est un phénomène planétaire. La population des soixante ans et plus est celle qui augmente le plus vite, ce qui s’accompagne de difficultés particulières auxquelles tous les pays devront faire face. Il est donc essentiel de préparer les soignants et les sociétés à répondre aux besoins des personnes âgées. Pourtant tout est fait pour retarder la retraite de l’emploi des salariés. C’est même un objectif du Traité Européen de Lisbonne qui engage la France à atteindre un taux d’emploi des seniors (+ de 45 ans) de 50 %. Le risque de vieillesse est malgré cela parfaitement identifié et les entreprises françaises de plus de 50 salariés sont tenues d’aménager les postes de travail de leurs seniors. « Libérer le travail » consiste donc à aménager l’exploitation et rendre impossible la retraite.
C’est pourquoi le chantier d’une vaste réforme des retraites visant à transformer radicalement notre système par répartition, annoncé pendant la campagne présidentielle, a été lancé par le Président Macron.
L’objectif de cette réforme est d’unifier l’ensemble des régimes de retraites actuels (régime général, régimes complémentaires obligatoires et régimes spéciaux) dans un régime unique par points à cotisations définies.
Cesser de baser le niveau des retraites sur de solides annuités acquises par le travail (car les cotisations sociales sont partie intégrante de la rémunération du travail) au profit d’un système aléatoire de points à valeur variable : tel est le programme que le Président Macron applique à près de 27 millions de salariés. Retraite par points et/ou système dits notionnels sont en réalité deux moyens d’individualiser le rapport à la pension et, surtout, d’en faire baisser le montant.
La part de PIB attribuée aux retraites est aujourd’hui égale à 14 %. Le nombre de retraités augmentera d’ici à 2050, mais il n’est pas pour autant envisagé d’augmenter cette part. Le montant des retraites doit donc mécaniquement baisser. C’est d’ailleurs la suite logique des attaques contre le pouvoir d’achat des retraités actuels au moyen de l’augmentation de la CSG sur les pensions et de la déconnexion complète de leur augmentation de l’inflation. Le PIB de la France augmentant chaque année, c’est bien une nouvelle part qui est destinée à augmenter les dividendes des actionnaires.
Le système à points équivaut, dans les faits, au système de retraite à l’américaine, par capitalisation. C’est ce que nous décrivons comme un véritable enfer actuariel. En effet, la part des retraites par répartition diminuant, les salariés qui en ont les moyens se tourneront vers les assurances privées et les fonds de pension à la française. La finance spéculatrice a donc de beaux jours devant elle !
« Dans une France libérée, nous libérerons le peuple des angoisses du lendemain ! » a écrit le résistant Ambroize Croizat le 14 janvier 1944. Or, en livrant une partie plus importante des retraites aux marchés, le Président Macron replonge les Français dans la peur du lendemain et les incertitudes.
La République apparaît de moins en moins sociale. Assistons-nous à son Requiem ?
Les annonces floues de réforme de la loi de 1905 semblent confirmer la volonté du Gouvernement d’organiser le repli de la République. Mai 68 était déjà critiqué, 1945 a été éliminé, 1936 atténué, 1905 réformé : il ne reste plus aux politiques rétrogrades qu’à défaire la loi de 1901 sur la liberté associative, celle de 1884 sur la liberté syndicale et celle de 1881 sur la liberté de la presse, et nous assisterons au retour de l’Ancien Régime d’avant 1789.
L’attaque actuelle contre nos retraites sonnera-t-elle la mobilisation pour la reconquête ? L’UFAL analyse, réfléchit et produit des arguments d’auto-défense. La force de l’UFAL est sa liaison avec les citoyens et les familles. Le devoir de tout républicain conscient et conséquent est de lui donner de la masse. Grâce à vous, notre association aura du poids dans cette mère des batailles que constitue la défense de nos retraites. À bientôt donc sur les champs des luttes.