Le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014, qui intègre les mesures du pacte de responsabilité et de solidarité, a été présenté en Conseil des ministres le 18 juin 2014. L’avant-projet de loi a été transmis le 6 juin aux caisses nationales de sécurité sociale pour avis.
Comme cela avait été annoncé, le texte pose les termes d’une remise en cause historique de la cotisation sociale et un nouvel affaiblissement des prestations sociales en direction des citoyens et des familles. Le renforcement de l’allègement Fillon pour créer un dispositif « zéro charges », la baisse de la cotisation d’allocation familiale avec des mesures spécifiques prévues pour les non-salariés, la suppression à l’horizon 2017 de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), la réduction dégressive de cotisations salariales sur les salaires compris entre 1 et 1,3 SMIC (pacte dit de « solidarité »), et le report d’un an de la prochaine revalorisation annuelle d’une partie des prestations de sécurité sociale (prestations familiales, pensions d’invalidité et rentes d’accidents du travail, allocation de logement familiale, et retraites de base), sous réserve de mesures particulières concernant les minima sociaux figurent dans le texte.
L’UFAL a eu l’occasion d’exprimer à de nombreuses reprises son indignation face à toutes ces mesures qui participent d’une destruction programmée de la cotisation sociale en tant que part indirecte et socialisée du salaire des travailleurs. Quant aux mesures d’économies sur les prestations sociales, elles constituent une nouvelle ineptie économique et sociale qui va gravement affecter les familles et les assurés sociaux en période de crise.
Comme si cela n’était pas suffisant, le gouvernement a de surcroît fait preuve une nouvelle fois d’amateurisme comme le relate les Échos. À moins qu’il s’agisse d’une action délibérée. En effet le Conseil d’État, consulté sur le texte, a estimé que le projet de loi rectificatif ne pouvait traiter que des mesures qui ont un effet dès 2014. Or, le projet de loi renvoie aux lois de 2015 le soin de mettre en œuvre des mécanismes de compensation financière intégrale pour la Sécurité sociale compte tenu des flux financiers en jeu. Ainsi, pour l’heure, le manque à gagner pour la Sécurité sociale, qui s’élève à plusieurs dizaines de milliards d’euros n’est nullement couvert. De la même manière, le gel des retraites et des aides au logement pourra être adopté immédiatement, mais la revalorisation des prestations familiales, des prestations d’invalidité et des rentes d’accident du travail qui étaient prévues en 2015, sont conditionnées par l’adoption d’une prochaine loi.
Notons toutefois une bonne nouvelle, les administrateurs de la CNAF ont émis le 10 juin un avis défavorable sur le projet de loi avec 20 voix contre (3 Cgt, 3 Fo, 3 Cfdt, 2 Cftc, 2 Cgc, 5 Unaf, 2 personnes qualifiées) et 13 voix pour (patronat, 1 professions libérale). Les administrateurs ont majoritairement indiqué que « le choix de la baisse des cotisations familiales pour les entreprises ne va pas dans la bonne direction, et qu’il constitue une mauvaise décision en termes économiques et sociaux ». Ils ont aussi dénoncé le gel de la revalorisation, pendant un an, des prestations familiales. Pour la première fois depuis longtemps, nous observons un front uni de l’ensemble des organisations syndicales et de l’Unaf face aux réformes sociales du gouvernement, ce qui est un événement suffisamment encourageant pour être signalé.
De même, le Conseil de la CNAMTS a également décidé de s’opposer au texte. Pour l’Assurance maladie, à qui 10 milliards d’économies sont demandées en trois ans, une majorité d’administrateurs du Conseil de la CNAMTS ont rendu un avis défavorable tant il fait peser de graves risques en termes d’accès aux soins.