Tout savoir, tout comprendre sur les avancées (quelles avancées ?) ou les tentatives d’avancées initiées par le gouvernement, ses reculades, ses pas de côté, ses pas de trop (ses pas de deux ?), ses tours de magie ou de party à propos de la Sécurité sociale, notre Sécu renommée, à grand renfort de marketing, dans un grand fourre-tout de « Grande Sécurité sociale ».
SOMMAIRE
06. ENFANCE – Le regard critique de l’Ufal sur la politique familiale
« Notre mouvement estime que les pouvoirs publics doivent permettre aux familles d’accueillir et d’élever dignement un nombre d’enfants conforme à leurs souhaits »
15. ÉGALITÉ – Quelles avancées autour de la petite enfance ?
Par Jacques Duplessis et Olivier Nobile qui font partie de «QSF», le pôle « Questions sociales et familiales » de l’Ufal, lequel traite et débat des thématiques suivantes : protection sociale, santé, travail, politiques familiales et éducatives.Les deux auteurs analysent la décision de la Commission européenne qui a fait adopter une directive sur le congé maternité / paternité qui doit être transposée en droit français d’ici le 1er juillet 2022. Sans remettre en cause les congés maternité en vigueur dans les différents pays, le texte prévoit un congé paternité d’au moins 10 jours, un « congé parental » de 4 mois non transférable par parent, une indemnisation de ces derniers au niveau accordé pour les prestations maladie ainsi qu’un congé d’aidant de 5 jours par an.
19. TROMPE L’ŒIL – Projet de Grande Sécurité sociale : trop beau pour être vrai
Le projet de Grande Sécurité sociale occupe depuis plusieurs semaines une place aussi inattendue que déroutante dans le débat public. Qui pouvait en effet envisager que le gouvernement Macron, parangon assumé du néo-libéralisme depuis près de cinq ans, décide d’inscrire à l’agenda politique le principe d’une prise en charge de l’ensemble des remboursements de santé par l’assurance maladie obligatoire de la Sécurité sociale ? Un tel projet qui rappelle celui de 100 % Sécu, défendu entre autres par l’Ufal, serait-il un véritable tournant social du gouvernement Macron ?
24. RÉSISTANCE – Grande Sécu : le bal des (nombreux) hypocrites
Le ministre de la Santé, Olivier Véran, a pris l’initiative de demander au HCAAM d’étudier quatre variantes visant à réformer le système de remboursements des soins. Ou dit autrement, à changer ou pas l’articulation entre l’Assurance-maladie et les organismes complémentaires santé.Cet article fait suite à celui paru dans Respublica, Le journal du réseau de la gauche républicaine, laïque, écologique et sociale, « Refonder la Sécu pour réaliser la République sociale » afin de tenir compte du rapport du Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance-maladie (HCAAM). Par Bernard Teper
31. MUTUELLE – Grande Sécu : avancée sociale ou arme de destruction massive ?
Comme désormais à chaque fin d’année, nous assistons à une attaque en règle contre les « mutuelles » (pas les assurances) accusées de tous les maux. C’est oublier que les taxes décrétées par les pouvoirs publics atteignent aujourd’hui deux mois de cotisations, que les transferts de charge n’ont jamais été aussi importants, et que la réglementation impose de détenir des réserves financières considérables. Comment s’étonner dans ces conditions d’une augmentation des cotisations ? Par Pierre Zilber
35. COMBAT – La naissance de la Sécurité sociale : le conflit plutôt que le consensus
La Sécurité sociale n’est pas un consensus mais le résultat d’un combat social démocratique et émancipateur. La vraie « Grande Sécu » ne pourra résulter que de la relance de ce combat. Par Nicolas Da Silva
39. MAGIE – Carburants, prix, taxe, et prime, à vos calculettes !
Depuis quelques mois, les prix de l’énergie sont en hausse et, avec l’augmentation du gaz et de l’électricité les Français subissent de plein fouet une flambée du prix des carburants. Des petites mesures qui prennent les citoyens pour des billes et qui ne sont pas à la hauteur des enjeux de la transition écologique. Par Maurice Abitbol
41. RÉVEILLON – Comment articuler fêtes sacrées et athéisme ?
L’exemple de James Guillaume et la question du réveillon de Noël – expérience vécue lors d’une soirée de réveillon au sein d’une Université populaire en 1903–, permet de questionner le rapport entre athéisme et festivités religieuses et d’évoquer, ainsi, des hypothèses sur la place du sacré. Par Jean-Charles Buttier
ENCART CENTRAL DÉTACHABLE : Spécial Semaine de la laïcité
Ufal INFO n°87. Dossier : Sécurité sociale, le grand bluff, 52 pages, 9 contributeurs, que vous pouvez vous procurer dans la boutique en ligne de l’UFAL en version papier ou numérique (2 euros en téléchargement)
Le N°86 avec un dossier spécial « Logement, la vérité » est téléchargeable ici
Tous les anciens numéros sont également consultables gratuitement : archives du journal
Édito de Nicolas Pomiès, rédacteur en chef
Grande sécu : la réalité, c’est le mouvant !
« La réalité coule ; nous coulons avec elle et nous appelons vraie toute affirmation qui, en nous dirigeant à travers la réalité mouvante, nous donne prise sur elle et nous place dans de meilleures conditions pour agir. » Henri Bergson, La Pensée et le Mouvant, 1934.
Les réformes sont le but de tout gouvernement. Et les changements apportés aux normes n’ont pas pour objectifs d’améliorer la vie des Français mais bien de satisfaire la rentabilité de l’accumulation du capital par l’oligarchie. C’est pourquoi les réformes ne sont que peu confiées au débat parlementaire. L’exécutif ne laisse transformer ses textes par le législatif qu’à la marge. Et si cela tourne mal, le sinistre article 49,3 permet de passer en force. Il faut, malgré tout, tester la réaction des masses et des corps intermédiaires avant la sortie de la loi. On ne sait jamais, une seule étincelle pourrait enflammer la plaine… C’est donc dans cette logique que l’annonce, cet été, d’un projet de « Grande Sécu » par le ministre de la Santé Olivier Véran, a été feuilletonnée par le biais de nombreuses fuites bien savamment orchestrées. Plusieurs scénarios élaborés par le Haut Conseil pour l’Avenir de l’Assurance Maladie (HCAAM), chargé d’étudier (sérieusement) le projet, ont donc été médiatisés. La « Grande Sécu », c’est étendre le régime obligatoire de la sécurité sociale à 100 % en éliminant les mutuelles. Aucun progressiste n’a défendu ce plan. Chats échaudés craignent l’eau froide. Les mots renversés et autres effets de rhétoriques, qui sont la spécialité du président Macron et de ses ministres, ne convainquent pas. En revanche, le monde de l’assurance et de la réassurance a été vent debout pour s’opposer à ce projet (flou). Avec comme héraut, Xavier Bertrand lui-même. Autant dire que le groupe français international AXA était contre.
Une nouvelle fuite du ministre Véran est, ainsi, venu clôturer (provisoirement) le bal des hypocrites. Il n’y aura pas de « Grande Sécu » pendant la campagne présidentielle. Mais soyons-en certains, le prochain quinquennat imposera une réforme du financement des soins, car la solvabilité des organismes de complémentaire santé qui s’appuie largement sur l’état les marchés financiers ne survivra pas à la crise financière qui s’annonce. L’étatisation de la protection sociale et son financement par l’impôt, plutôt que par les richesses produites par les entreprises, vont se poursuivre et le gouvernement saura ménager les monopoles assurantiels. C’est d’ailleurs une constance de l’État que de se renforcer dans son rôle de garant d’un intérêt général qui protège, avant tout, le système capitaliste et donc les privilèges bourgeois.
La prochaine opération de prestidigitation consistera à tenter de faire paraître comme social un taux de CSG augmenté tout en baissant le brut des salaires et les pensions des retraités. Donner d’une main pour reprendre de l’autre, il ne manque pas d’exemples pour conforter cet adage populaire. Ainsi la taxe d’habitation baisse mais la taxe d’enlèvement des ordures ménagère (TEOM) augmente ; les cotisations sociales baissent mais les cotisations de mutuelles s’accroissent, à cause des taxes et des prestations qui ne sont pas prises en charge par la Sécu. Il n’y a, effectivement par d’argent magique, ce sont toujours les salariés et retraités qui payent de plus en plus sur leur net imposable tandis que la rentabilité du capital est en croissance. Notre réalité mouvante est celle-ci. Toutes les mesures gouvernementales ne renforcent pas le pouvoir d’achat de la majorité des familles mais enrichissent fortement les déjà riches. En 2021, la fortune des milliardaires français a augmenté de 170 milliards d’euros, soit une hausse moyenne de 40 %. A l’autre pôle de la société, c’est l’explosion des bénéficiaires de l’aide alimentaire, l’augmentation du nombre d’allocataires au RSA et ce n’est pas moins d’un million de personnes qui aurait basculé dans la pauvreté à cause de la pandémie et qui s’ajoutent aux 9,3 millions de personnes vivant, déjà, au-dessous du seuil de pauvreté en France.
Dans Économie des inégalités, Thomas Piketty traite du sujet du partage de la valeur ajoutée comme d’un enjeu politique. Selon lui, « En l’absence de toute action publique de redistribution, le partage effectif entre capital et travail dépendra, par exemple, du pouvoir de négociation des syndicats, des capacités des employeurs à s’approprier une large part, ou plus généralement de l’état présent des rapports de forces entre capitalistes et travailleurs ». A l’instar de Jean Jaurès, nous devons avoir le courage de chercher la vérité et de la dire. Notre devoir est d’éclairer inlassablement et de rassembler ceux qui souffrent et ramener en solidarité ceux qui pensent que leur situation relativement confortable les exonère de lutter dans le mouvement social. Le rapport de force dépendra de la conscience d’appartenir à une grande association politique qu’est la République dans laquelle la fraternité retrouvera tout son sens.
Le génial Pierre Leroux, comme le qualifiait Karl Marx, disait que « Nos pères avaient mis sur leur drapeau Liberté, Égalité, Fraternité. Que cette devise soit la nôtre…. Je mets la fraternité au centre de la formule parce qu’elle est le lien entre la liberté de chacun et la liberté de tous ou égalité ».
Il n’y a pas plus belle vérité à rappeler. La fraternité fait le peuple ! La « Grande Sécu », la vraie sera la nôtre, une grande mutuelle unique financée et démocratiquement gérée par les salariés. La spoliation capitaliste n’a que trop durée.